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LA SÉCURITÉ: LE COMPLEXE D' INFÉRIORITÉ DES SOCIALISTES !

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Vendredi 31 août 2012

Depuis longtemps, les questions de sécurité suscitent un complexe d'infériorité au Parti socialiste. Les accusations de laxisme, d'angélisme à son égard font à chaque fois mouche et conduisent les dirigeants socialistes à faire leur mea culpa et à réaffirmer leur attachement à des politiques répressives en la matière. La célèbre déclaration de Lionel Jospin en mars 2002 sur la naïveté de son gouvernement a, de l'intérieur, renforcé cette croyance. Pourtant, cette idée ne repose pas sur des données objectives. Certes, les années 1997-2001 ont vu les statistiques de la délinquance enregistrer un accroissement des délits, et les années suivantes une décroissance.

Mais on sait que les chiffres posent plus de questions qu'ils n'apportent d'arguments, et qu'ils sont susceptibles d'aménagements : focalisation sur les petits délits qui permettent de "faire du chiffre", refus d'enregistrement de certaines plaintes pour faire baisser la délinquance, fermeture de postes de police et de gendarmerie rendant plus difficiles ces dépôts de plaintes. A contrario, l'augmentation de la délinquance de la fin des années 1990 doit beaucoup à l'ouverture de nombreux postes de proximité et à la mise en place d'une politique d'accueil des victimes.

Hors les chiffres, on observe que depuis la fin des années 1980, voire avant, les ministres de l'intérieur de gauche n'ont jamais invité les policiers au laxisme ou au laisser-aller. Chacun a, dans ses discours et dans ses actes, souligné l'importance de la répression, et le discours sur les "sauvageons" de Jean-Pierre Chevènement vaut bien d'autres déclarations tonitruantes entendues avant – Charles Pasqua – ou après lui – Nicolas Sarkozy.

 

Rappelons aussi que les lois qualifiées par certains de "sécuritaires" ne débutent pas avec l'arrivée de M. Sarkozy Place Beauvau. A maints égards, la loi sur la sécurité quotidienne du 15 novembre 2001, qui suit les attentats de New York, marque le vrai tournant, que ce soit pour le développement des fichiers, la lutte contre la fraude dans les trains ou les occupations de halls d'immeuble.

L'image laxiste accolée à la gauche doit plus à l'habileté des communicants de l'ancienne majorité présidentielle qu'à une quelconque faiblesse intrinsèque. Elle se fonde sur une image caricaturale et erronée de ce qu'est, ou devrait être, une politique de sécurité.

D'un côté, il y aurait la répression impitoyable, menée par des hommes politiques volontaires et inflexibles. De l'autre, des politiciens laxistes juste bons à faire jouer les policiers au football avec les délinquants des cités, au lieu de les interpeller, comme le montre la polémique sur la police de proximité, assimilée à une police "gentille". Or, cette dichotomie apparente cache en fait d'autres réalités.

"Proximité" n'est pas opposé à "répression", bien au contraire. Pour faire de la répression efficace, il est nécessaire d'avoir des policiers ancrés dans un territoire, qui connaissent les gens et disposent d'informations ; à défaut de proximité, la répression touche essentiellement les petits délits. En outre, le rejet de la police de proximité est surtout la négation d'une police au service du public. Il s'est en effet accompagné d'un renforcement des caractéristiques traditionnelles de la police nationale française : hypercentralisation et bureaucratisation.

En effet, aucun autre pays développé n'a connu comme la France un tel rejet de l'idée de proximité.

La nécessité de créer une image de puissance à la tête de l'Etat explique certes l'affirmation d'une politique de sécurité hypercentralisée, mais elle n'a pu se développer que parce qu'elle correspondait à une tradition de fonctionnement technocratique où toutes les décisions sont censées se prendre au sommet de la hiérarchie.

Dans ce cadre, le policier français est jugé avant tout sur sa capacité à appliquer les décisions du ministère et à répondre à ses injonctions, telles que la production des "bons chiffres". La réponse aux préoccupations des citoyens et l'adaptation aux réalités locales servent dès lors de variables d'ajustement. En d'autres termes, mieux vaut un policier obéissant aux directives nationales qu'un policier qui réponde aux demandes des habitants de son secteur.

Tous les ministres de l'intérieur, depuis 2007, conscients de la nécessité de développer une action plus localisée se sont heurtés à ce principe.

Bien qu'il génère de multiples difficultés, notamment pour les policiers de terrain, ce mode de fonctionnement est difficile à remettre en cause, parce que les multiples acteurs qui participent à cette machine craignent de voir leur pouvoir et leur image s'effriter. La réflexion sur l'évolution du métier de policier s'en trouve de fait limitée.

Réformer l'institution policière et lui faire adopter de nouvelles stratégies de sécurité demande du courage, de la pédagogie et du temps. La gauche a su autrefois lancer de grandes opérations de modernisation de la police et de renouvellement de ses stratégies.

Saura-t-elle aujourd'hui mettre en place une vraie réforme redonnant la priorité au local ? Saura-t-elle relancer une vraie réflexion avec évaluation sur l'impact des nouveaux dispositifs mis en place ?

Si la police échoue à répondre aux attentes des citoyens, c'est à nouveau vers la concurrence que ceux-ci se tourneront, c'est-à-dire les polices municipales, si les budgets des collectivités locales le permettent, ou la sécurité privée, qui n'est pas à la portée de tous.

Christian Mouhanna, directeur adjoint du Centre de recherches sociologiques sur le droit et les institutions pénales, chargé de recherches au CNRS

Spécialiste des questions de police et de justice, Christian Mouhanna est l'auteur de plusieurs ouvrages dont La Police contre les citoyens ? (éd. Champ social, 2011) et L'Avenir du juge des enfants : éduquer ou punir ? (éd. Erès, 2010, avec Benoît Bastard).

http://www.lemonde.fr

 


Débat : gauche et sécurité, un mariage de raison ?

Le gouvernement a été exposé, cet été, à l'accusation de pratiquer la même politique que Nicolas Sarkozy.

Entre tendance "libertaire" et "jacobine", entre "laxisme" et "fermeté", comment la gauche au pouvoir s'approprie-t-elle les questions de sécurité ?

A-t-elle une approche différente de celle de la droite ?

Des chercheurs et des personnalités politiques donnent leurs points de vue.

 

http://www.lemonde.fr
via http://www.laurent-mucchielli.org


http://lechevalierfrancois.over-blog.com/article-difficile-decentralisation-de-la-police-109586329.html


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