Être libre ou payer : Depardieu a choisi
« Je pars parce que vous considérez que le succès, la création, le talent, en fait, la différence, doivent être sanctionnés. »
Cette phrase tirée de la lettre ouverte que Gérard Depardieu a adressée à Jean-Marc Ayrault, Premier ministre, le 16 décembre, illustre son choix de partir de France et de s’installer en Belgique.
L’acteur s’est reçu une volée de bois vert de la part du gouvernement. Jean-Marc Ayrault l’a traité de « minable », Michel Sapin, ministre du Travail, l’a considéré comme atteint « d’une forme de déchéance personnelle », Aurélie Filippetti, ministre de la Culture, s’est dite scandalisée, Alain Vidalies, ministre des Relations avec le Parlement, choqué et Harlem Désir, secrétaire général du Parti socialiste, attristé.
Ce vocabulaire, sciemment choisi, tente de discréditer les choix du personnage, mais surtout il révèle des tendances politiques et économiques inquiétantes pour chacun des contribuables français.
En effet, à travers le cas Depardieu, se profilent de graves atteintes au droit de propriété, à la liberté d’entreprendre et à la liberté de circulation.
L’atteinte au droit de propriété
« J’ai payé 145 millions d’euros d’impôts en quarante-cinq ans » souligne Depardieu, précisant plus loin, « je pars, après avoir payé, en 2012, 85% d’impôt sur mes revenus. »
D’une part, l’Etat pratique une spoliation active puisque ces impôts sont ponctionnés au nom du principe de redistribution, c’est-à-dire, comme l’a clairement défini l’économiste Frédéric Bastiat, « prendre aux uns ce qui leur appartient pour donner aux autres ce qui ne leur appartient pas ».
D’autre part, cette spoliation s’exerce sur la propriété puisque, reprenant la définition du même Bastiat, la propriété est « le droit qu’a le travailleur sur la valeur qu’il a créée par son travail », donc en premier lieu son revenu. Ainsi il ne reste plus à Depardieu que 15% de sa propriété ce qui équivaut à de la dépossession ou, pour être plus clair, à de la confiscation.
L’atteinte à la liberté d’entreprendre
« Je fais travailler 80 personnes dans des entreprises qui ont été créées pour eux et qui sont gérées par eux. »
Tout le monde le sait, Depardieu a diversifié ses activités dans des restaurants, des bars à vins, des vignobles. Il est donc chef d’entreprise et investisseur, et surtout créateur d’emplois.
Mais justement, l’atteinte au droit de propriété décourage l’esprit d’entreprise : pourquoi prendre tant de risques et travailler autant pour finalement n’avoir qu’une portion congrue que l’Etat voudra bien laisser ?
Le gouvernement ne semble pas comprendre qu’un entrepreneur a besoin de liberté. Et pour cause : la très grande majorité des ministres sont issus du fonctionnariat ou du monde associatif, ils n’ont pas de notion concrète de la manière dont fonctionne une économie de marché.
La culture de la subvention et de la nomination n’a rien à voir avec l’entreprise privée d’où un dialogue quasi impossible à établir.
L’atteinte à la liberté de circulation
« Je n’ai pas à justifier les raisons de mon choix, qui sont nombreuses et intimes » dit Depardieu. Il a raison. Il s’installe en Belgique. Et alors ? Il est toujours dans l’Union européenne. Or depuis le Traité d’Amsterdam de 1997, nous sommes tous des citoyens européens : c’est inscrit sur le passeport français, comme sur le passeport belge d’ailleurs.
En outre l’Union a été instaurée pour favoriser la libre circulation des biens et des citoyens. Il est étrange de voir tout le gouvernement socialiste, d’habitude pourfendeur du nationalisme et promoteur de l’universalisme, clamer tout d’un coup, à travers une Aurélie Filippetti scandalisée, que « la citoyenneté française, c’est un honneur ».
Et elle nous explique pourquoi : parce que cela permet de « pouvoir payer l’impôt » ! Dans cette perspective, la liberté de circulation semble bien poser un problème.
Ces trois atteintes sont les symptômes d’un gouvernement hostile au libre choix et à la souveraineté individuelle.
Car, il faut bien le comprendre, la phrase de Depardieu qui a mis le feu poudre est celle-ci : « Je vous rends mon passeport et ma Sécurité sociale, dont je ne me suis jamais servi. »
La raison en est bien simple, rappelée de nouveau par Bastiat : « L’Etat, ne l’oublions jamais, n’a pas de ressources qui lui soient propres. Il n’a rien, il ne possède rien qu’il ne prenne aux travailleurs ».
Or pour payer ses fonctionnaires, ses dépenses publiques et sa dette, l’Etat a besoin des contribuables.
Si ceux-ci considèrent que les limites du supportable ont été dépassées et qu’ils utilisent, comme Depardieu, leur liberté de mouvement pour aller ailleurs afin de protéger leur propriété et leur liberté d’entreprendre, alors l’Etat se considère en danger puisqu’il perd sa seule source de financement.
La tentation est grande, alors, d’esquisser des politiques de contrôle et de contraintes territoriales et fiscales que l’Etat, aux abois financièrement, pourrait être amené à prendre pour empêcher les contribuables de quitter son pré carré.
Et il se peut qu’un jour, peut-être proche, devant cet Etat bafouant de plus en plus la liberté et la propriété de ses propres citoyens en les ponctionnant toujours plus, nous disions, à l’instar de Depardieu : « Je n’ai malheureusement plus rien à faire ici. »
Source et publication: : merci à Gele / facebook