Le Conseil constitutionnel a amputé le pacte de compétitivité mais presque validé la réforme de Christiane Taubira.
Apparemment, il se montre plus regardant pour le social que pour le pénal !
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Deux tragédies criminelles récentes, chacune avec sa spécificité de lieu et d’action, ont montré à quel point la France serait condamnée à sans cesse endurer le hiatus entre une mansuétude gouvernementale, un humanisme conseilleur mais des victimes pour payeurs d’un côté et, de l’autre, une réalité trop souvent terrifiante.
À Dolomieu (Isère), après le braquage d’un tabac-presse le 29 juillet commis par deux malfaiteurs, Hugo Villerez était abattu par l’un d’eux parce qu’il tentait d’intervenir et de le faire interpeller.
Mukaël Erdem, qui s’est vu reprocher cet acte, a été mis en examen, notamment pour vol accompagné de violences ayant entraîné la mort, puis incarcéré. De même que Morgan Vert qui l’accompagnait et s’est malheureusement suicidé en se pendant.
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Un immense émoi après ce désastre humain : près de 700 personnes aux obsèques de la victime.
À l’Alma, dans un quartier de Roubaix déshérité, dont les habitants se sentent abandonnés par les pouvoirs publics, un père de famille de 27 ans unanimement apprécié, courageux – il avait sauvé quelqu’un d’une noyade – a été tué par deux jeunes gens qui faisaient des rodéos en pleine nuit avec une voiture volée et qu’il avait interpellés de sa fenêtre pour les faire cesser.
Ulcérés, ils l’ont cherché puis trouvé dans cet immeuble délabré et au moins un coup de couteau dans la gorge lui a été porté avec un effet mortel.
Rapidement, l’un des protagonistes a été interpellé puis l’autre s’est livré plus tard : petit délinquant pour le premier, selon le procureur adjoint de Lille, et jeune majeur au casier chargé pour le second.
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Mukaël Erdem a écrit une lettre à la mère d’Hugo Villerez pour exprimer ses remords et expliqué qu’il avait tiré « paniqué » parce que celui-ci venait vers lui. Selon son avocate, sa démarche était spontanée et sincère et il désirait l’accomplir immédiatement.
Je n’ai aucune raison de considérer ce geste comme tactique, d’abord parce qu’il est très rarement mis en œuvre à ce stade initial alors qu’en cours de procédure et avant l’audience, il survient mais risque d’être perçu pour seulement habile.
Que ce jeune homme ait éprouvé le besoin de s’adresser à cette mère donne de sa personnalité une image que le crime n’a pas totalement dégradée.
Mais il n’y a aucun rapport avec ce mouvement intime que la procédure va intégrer et cette justice « réparatrice » qui pousserait victimes et condamnés à se rencontrer et à dialoguer.
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Stéphane Jacquot, qui a créé l’Association nationale de la justice réparatrice, prétend que cette interrogation et cette exigence sont « très peu développées au cours d’un procès », ce qui est totalement faux.
Le plus souvent, sauf à l’égard de faits délictuels ou criminels simples et utilitaires, le prévenu ou l’accusé ont du mal à démêler les motivations profondes de leurs agissements et s’ils n’y parviennent pas à l’audience malgré son caractère irremplaçable, ils demeureront encore plus inconnus à eux-mêmes en face de leurs victimes.
Parlons net : cette justice réparatrice est, au pire un gadget pour curiosités malsaines, au mieux une relation qui n’aura aucune incidence sur le cours de la justice pénale puisqu’elle se déroulera, la sanction infligée.
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Extrait de : Le Général, le particulier et l’illusion