La réalité n'est pas toujours conforme à notre intuition: certaines "évidences" ne correspondent parfois à aucune réalité.
Ainsi, par exemple, pendant le dernier quart du XIXème siècle, on a cherché à axiomatiser l'arithmétique (programme de Hilbert), en considérant comme évident que c'était possible.
Mais le théorème de Gödel a sonné le glas de cette espérance.
De même, l'idée démocratique cherche à mettre en application le concept de "volonté générale".
Or la "volonté générale" n'existe pas, tout simplement, et on le sait depuis longtemps, grâce aux :
Théorèmes d'impossibilité d'Arrow, de Gibbard-Satterthwaite, théorème du Chaos majoritaire:
Annexe 1: MyMithra a demandé à des démocrates "rationalistes" ce qu'ils pensaient du théorème d'Arrow : Quand l' "Union Rationaliste" rejette la rationalité Annexe 2 : Pourquoi vouloir mettre en oeuvre la "volonté générale" est identique à vouloir appliquer "2+2=5".
Dans le langage courant, les 3 hypothèses de non manipulabilité, d'unanimité et de non dictature sont implicites dans le concept de "volonté générale". Mais dans ce cas les choix collectifs ne sont pas transitifs: ils sont donc incohérents, c'est-à-dire que l'ensemble des choix collectifs est une proposition P contradictoire. (exemple: P = "La collectivité préfère strictement X à Y, Y à Z et Z à X"). Néanmoins, en démocratie, on considère qu'il existe au moins une proposition P satisfaisant aux 3 hypothèses et qui soit vraie. Mais comme P est contradictoire, P est donc en même temps fausse et sa négation nP est donc vraie aussi.
Appelons A la proposition "2+2=5". Ainsi, l'idée de la démocratie est bien d'appliquer le principe suivant : "2+2 = 5".
Annexe 3: Des critiques de mon interprétation du théorème d'Arrow et mes réponses:
Kenneth ArrowDe Wikiberal: Kenneth Joseph Arrow, né le 23 août 1921 à New York, est un économiste américain. Il est co-titulaire, avec John Hicks, du prix « Nobel d'économie » en 1972 pour ses travaux sur la théorie des choix collectifs et la théorie de l'équilibre général. L'apport de Kenneth Arrow, à la pensée libérale et à la théorie de l'organisation, concerne essentiellement son intérêt à la notion de l'apprentissage, de connaissance et de la confiance qu'il introduit dans son article de 1974. Les firmes disposent de cette faculté de fournir à leurs membres un langage commun ou un code. Kenneth Arrow a examiné le rôle des codes propres à l'entreprise. Il a noté que l'apprentissage des canaux d'information au sein d'une entreprise et les codes de transmission de l'information ont une valeur de compétence uniquement en interne. L'apprentissage d'un code par une personne physique est un acte d'investissement personnel qui constitue également une accumulation de capital pour l'organisation. Le partage de la valeur confiance dans une société agit comme un « lubrifiant social » qui a des effets sur la performance. Son travail permet de comprendre également l'évolution des entreprises, non pas vue comme un effet mécanique et subissant des ordres hiérarchiques mais découlant d'un processus naturel et culturel. Kenneth Arrow appartient au courant dominant de l'école néo-classique avec une défense absolue de l'individualisme méthodologique : "Il n'est pas vraiment nécessaire pour l'entreprise d'être l'unité fondamentale de l'organisation dans l'invention, il y a beaucoup de raisons de supposer que des talents individuels comptent beaucoup plus que l'entreprise en tant qu'organisation".Le théorème d'ArrowDans sa thèse Choix social et valeurs individuelles (1951), Arrow généralise un résultat déjà obtenu par Condorcet en montrant qu'il est impossible de définir l'intérêt général à partir des choix individuels. On ne peut définir de façon cohérente une préférence collective en agrégeant des préférences individuelles. Les décisions d'un état (même démocratique) ne peuvent donc pas être légitimes. Ce "théorème d'impossibilité" s'énonce ainsi (en simplifiant, car il s'agit d'un théorème mathématique de théorie des ensembles qui réclame une démonstration élaborée) :
Plus précisément, étant données les hypothèses suivantes :
le théorème d'Arrow affirme alors qu'il est impossible de satisfaire en même temps aux 5 conditions : si les 4 premières sont satisfaites, la 5ème ne l'est pas. La conséquence de ce théorème est que la prétention de la démocratie (qu'elle soit directe ou représentative) à exprimer une "volonté générale" est une imposture : la "volonté générale" n'existe pas, et les politiciens n'obéissent qu'à leur intérêt particulier. On ne peut non plus affirmer que la démocratie soit systématiquement, et par nature, meilleure que ladictature (car il peut y avoir des "despotes éclairés" aussi bien que des "démocrates totalitaires"). Ce théorème confirme ce qu'on peut comprendre intuitivement assez facilement : si Pierre préfère A, Paul préfère B et Jean préfère C, il ne peut y avoir de "choix collectif" de Pierre, Paul et Jean. La règle de la majorité n'est qu'une règle qui ne peut définir un choix collectif légitime. Tocqueville l'expliquait déjà :
Henri Lepage souligne le fait paradoxal que ce théorème, apparemment en faveur des thèses libérales, peut être invoqué pour justifier l'existence d'une élite qui décide au nom de l'intérêt général, puisque cet intérêt ne saurait être défini à partir de l'agrégation des intérêts individuels :
Voir aussi : théorème de l’électeur médian, loi d'airain de l'oligarchie. Preuve du théorème d'ArrowSoit I l'ensemble de la population et A l'ensemble des choix possibles A = (a,b) . J est une partie décisive pour (a,b) si pour tout élément i de J ( groupe de personne ou individu ) si i préfère a à b alors globalement a est préféré a b). Soit J partie décisive minimal et j appartenant à J et une situation de Condorcet. z appartenant à A. j : a préféré à z et z préféré à b. J privé de j : b préféré à a et a préféré à z I privé de J : z préféré à b préféré à a Alors on a a préféré à z car J décisive mais b n'est pas préféré à a car sinon J privé de j serait décisive et J ne serait pas minimal. D’où a préféré à b et a préféré à z or la relation de préférence individuelle de l'individu i est un pré-ordre ( i.e réflexive et transitive) et b préféré à z est impossible d’où z préféré à b. Au final, on a a préféré à z et z préféré à b qui sont les préférences de j. On obtient une situation de procédure dictatoriale. source et publication: http://www.lumieres-et-liberte.org/article-l-imposture-democratique-121707459.html |