Le Maroc pris au piège |
MAROC HEBDO INTERNATIONAL N° 1038 - Du 13 au 19 septembre 2013 Le CNDH propose des recommandations pour une régulation du flux migratoire subsaharien. Le Maroc ne saurait accueillir tous les migrants qui souhaitent s’y installer. Par abdellatif mansour Jusqu’ici, on s’est contenté de réagir par des expédients et par à coups. Un déni de réalité totalement contre-productif, avec son lot inévitable d’effets pervers. La problématique de l’immigration subsaharienne au Maroc méritait bien une approche réfléchie et globale, appuyée sur un éventail de réponses appropriées et applicables. C’est fait. Le Conseil national des droits de l’Homme (CNDH) vient de présenter à S.M. le Roi, le lundi 9 septembre 2013, un rapport sur la question, pour validation. À l’évidence, pour son président, Dirss El Yazami (voir interview pages 16-18), cela devenait urgent face à un phénomène qui s’inscrit, de plus en plus, dans la durée et qu’on ne peut occulter en faisant semblant de l’ignorer. Mieux vaut tard que jamais. La communication passe sans problème. À observer attentivement, nous sommes devant une situation mitigée. D’une part, on voit bien qu’il s’agit de ressortissants venus d’ailleurs, que leur nombre grandissant et leur séjour prolongé provoquent quelques interrogations, voire quelques inquiétudes diffuses. Mais, sans plus. D’autre part, les concernés eux-mêmes ne se sentent pas perçus comme des intrus indésirables, dès lors qu’ils ne font l’objet d’aucune réaction de rejet, tel qu’ils pourraient en subir sous d’autres cieux. Profondeur historique Quant au Sahel, dont on parle tant ces jours-ci, il n’a jamais été un obstacle géographique, encore moins une ligne de séparation humaine. Il a, par contre, représenté l’ultime marche qui donne sur l’Afrique profonde. Une marche facilitatrice d’une activité commerciale intense et continue, avec tous les brassages humains qui vont avec. Le Maroc y était, en poste avancé, à la fois comme point de départ et espace d’arrivée; comme zone d’émission et terre d’accueil. Autrement dit, le Maroc ne pouvait être qu’africain ou ne pas être. Ce bourdonnement de vie des deux côtés du Sahel, qui a traversé les âges, n’a été interrompu que par la colonisation. Le fait qu’il reprenne aujourd’hui, sous d’autres formes et dans un autre contexte, s’inscrit dans cette longue trame séculaire. On y trouve aussi l’explication de la manière avenante dont nos cousins d’Afrique sont accueillis au Maroc. Changement d’époque Cela n’est pas pour autant de nature à nous exonérer d’un regard réaliste sur ce nouveau phénomène migratoire. En l’occurrence, un encadrement législatif de ce flux humain un peu particulier dans son genre et dans son timing. Un vide que le CNDH appelle à combler par un effort de législation adapté, conséquent et coordonné. Le rapport du CNDH part d’un constat évident: la population migrante qui prend le Maroc pour destination n’est pas homogène. Trois grands groupes sont à distinguer. Priorité négative à ceux qui sont en situation irrégulière et qui ont forcément franchi les frontières de façon illégale. Ils se mettent ainsi en position conflictuelle avec les représentants des pouvoirs publics, même s’il n’y a pas d’usage systématique de la force pour les dissuader. Dans ce cas d’espèce, deux principes de base sont retenus: leur accompagnement aux frontières dans les meilleures conditions possibles. Et leur fournir tous les moyens effectifs de se défendre s’ils sont passibles de poursuites judiciaires. Les autorités consulaires sont évidemment alertées. Quelles que soient les circonstances de leur interpellation, leurs droits humanitaires doivent être strictement respectés. Il faut rappeler à ce sujet que le Maroc a souvent été la cible de critiques acerbes quant aux conditions de refoulement des immigrés illégaux. Ils seraient déposés en plein désert, sans provisions de survie, entre autres cruautés. Des accusations pas toujours justifiées et difficilement vérifiables. D’où l’importance extrême des recommandations du CNDH et des engagements que l’État devrait prendre vis-à-vis des institutions internationales et des observateurs étrangers. Un effort de communication qui ne pourrait qu’améliorer l’image d’un Maroc pris entre l’enclume d’une déferlante migratoire et le marteau de pourfendeurs attitrés et malvenus. Catégorie à part Étant la raison d’être de leur présence au Maroc, le non refoulement est un droit acquis. Pas question donc de livrer un refugié statutaire suite à un quelconque retournement de situation politique dans le pays d’origine ou le pays d’accueil, comme cela se produit de temps à autre de par le monde. Le CNDH demande que soit accordé aux étrangers en situation régulière, le droit de vote aux élections locales. Une innovation et un nouvel espace d’expression citoyenne et d’intégration que des pays du Nord, telle la France, n’ont pas encore ouvert à leurs immigrés en résidence permanente, bien qu’ils soient à l’égard du fisc tout aussi mis à contribution que les nationaux dit de souche. Ils sont ainsi injustement privés d’un doit de regard sur la gestion de leurs villes et village. Ils restent une catégorie inclassable bien qu’elle soit partie prenante du nouveau phénomène migratoire et à l’origine de tous ses drames. Il s’agit des organisateurs des filières d’immigration clandestine, hasardeuse et meurtrière. Le CNDH demande pour ces pontes d’une nouvelle forme de traite humaine, ainsi que pour leurs acolytes avérés ou objectifs, les sanctions pénales les plus fermes et les plus dissuasives. Retour aux sources Après avoir été pendant des décennies uniquement un pays d’émission, le Maroc est désormais une terre d’accueil. Même si cette évolution n’est en fait qu’un retour aux sources, en accord avec son héritage culturel, le Maroc l’a subie plus qu’il ne l’a voulue par les temps actuels. Et il va crescendo. De l’autre côté du Sahel, le Maroc est considéré comme l’étape ultime avant de prendre pied dans l’Eldorado européen. Il en est déjà l’anti-chambre, à quelques encablures d’un rivage de tous les fantasmes dont il dégage comme un parfum d’avant-goût. Evidemment que nos cousins du Sahel se trompent, pas seulement sur l’Europe, mais aussi sur le Maroc. Ce qui ne l’empêche pas de nous demander d’être son gendarme sur ses flancs sud, en faisant de notre mieux pour endiguer et réduire la pression migratoire qui lui est destinée. Un rôle dont le Maroc n’a ni la vocation, ni les moyens. Il a déjà suffisamment à faire pour assurer l’étanchéité de ses confins sahariens. Sur ce registre, l’attitude de l’Europe est pour le moins légère, pour ne pas dire légèrement cynique. Attitude cynique Des consignes royales ont été données pour la régularisation de la situation de ces immigrés surprise, au même titre que les Subsahariens. Une égalité tout aussi inattendue. Un poids, une mesure. Comme pour boucler la boucle, nos voisins algériens nous mettent sur le dos les immigrés qui leur viennent de leur vaste contrefort saharien. Ils les acheminent, avec une diligence infinie, jusqu’à nos frontières orientales. Maroc Hebdo et les immigrés clandestins
Pourtant, la totalité de l’article exposait une réalité connue de tous. La situation des immigrés subsahariens clandestins au Maroc est telle qu’il fallait en parler. L’auteur, Najib Abdelhak, avait notamment écrit que le Maroc ne pouvait plus gérer ce flux constant de candidats à la clandestinité.
Et les Subsahariens, de leur côté, pointent du doigt les agissements des autorités marocaines à leur égard. Entre le marteau africain et l’enclume européenne, le Maroc doit faire face. Comment? Bien malin qui saura répondre à cette question. Toujours est-il que l’histoire nous a donné raison, malheureusement, pour les Subsahariens. Ceux-ci vivent dans de très mauvaises conditions. http://www.maroc-hebdo.press.ma/index.php/component/content/article/56-numero-precedent/7980-le-maroc-pris-au-piegeA.N |