Montpellier : une banquière condamnée pour harcèlement à 1 500 € d’amendeby jpbacman |
Le tribunal correctionnel vient de rendre une décision rarissime dans une affaire qui ne l’est pas moins.
Une directrice d’agence bancaire a été condamnée pour harcèlement moral sur cinq agents (1). Bernadette, 56 ans, petite, cheveux gris, a un caractère bien trempé. Elle ne le conteste pas. Mais elle a son travail chevillé au corps, un véritable sacerdoce.
En 2002, elle devient la première femme chef de l’agence montpelliéraine du Crédit coopératif.
Trois ans plus tard, une partie des agents commence à se plaindre.
Ils finissent par saisir l’Inspection du travail, qui rend un rapport débouchant sur des poursuites pénales (2).
"Les qualités professionnelles ne sont pas en cause, vous êtes une excellente salariée, a précisé le président du tribunal, fin janvier, lors du procès.
Tout le monde dit que vous êtes autoritaire et le problème est de savoir où placer le curseur."
"Nous sommes dans la banque, pas dans la littérature"
La directrice jugée
Les plaignants ont décrit des situations de travail intenables : des cris, des réprimandes, des humiliations... "Ils avaient peur, ils étaient effrayés, ils n’en pouvaient plus de supporter des propos véhéments, méprisants.
Ces salariés étaient mal en point", a expliqué l’inspectrice du travail. Elle cite aussi des dates de congés refusées systématiquement, des primes toujours accordées aux mêmes et la peur de la mutation- sanction souvent présente.
“100 + 0 = 0”
Pêle-mêle, selon les employés, cela donnait ce genre de remarque hurlée : "Votre travail est nul" ; «C’est ni fait ni à faire" ; «C’est du travail à la X" (une des parties civiles, la tête de Turc, NDLR) ; "J’en ai assez de corriger les conneries des chargés de clientèle"...
Droite dans ses bottes à la barre, Bernadette, qui a toujours été soutenue par sa hiérarchie, conteste le harcèlement mais pas ses remarques.
"Nous sommes dans la banque, pas dans la littérature. Il y avait des erreurs considérables, du style : “100 + 0 = 0”. À chaque fois, je répétais les mêmes règles, j’étais là pour assurer la sécurité des personnes et des règlements, s’est-elle défendue.
Si j’avais fait du harcèlement, j’aurais été réprimandée."
À la barre, ses soutiens ont défilé pour la défendre : "Elle a une voix qui porte mais elle ne crie pas", dit l’un. "Elle était directrice ; quand elle donnait un ordre, elle donnait un ordre", explique un autre.
Tous ont loué son investissement sans faille dans le travail, jusqu’à un extrême qui lui a valu cette condamnation.
(1) Elle a écopé d’une amende de 1 500 €.
(2) Une procédure devant les prud’hommes, en appel, est actuellement en cours.