JEUDI 24 JANVIER 2013
Misère du mystère
Une autre contradiction du complotisme tient dans l'équivalence :
complot = instabilité, alors que le complotisme se targue de stabilité dans son analyse.
L'analyse complotiste est prise en flagrant délit de contradiction, puisque le propre du complotisme consiste à ne jamais dévoiler les responsables d'un complot, et, plus loin dans la grille de lecture, à expliquer in fine le déroulement du réel, du moins du monde de l'homme, de la société, de la culture, par le complot.
C'est ainsi rédupliquer le mystère. Mystère particulier du complot. Mystère du complot généralisé.
Dans le 911, le complotiste ne va jamais mettre en lumière les dernières déclarations de Bob Graham, huile de la politique américaine, de tendance démocrate comme l'actuel Président, un des rouages essentiels du monde du renseignement américain, et un des acteurs centraux du renseignement à propos du 911.
Cet individu dévoile, ainsi que le déclaraient LaRouche et Steinberg de l'EIR, que les commanditaires du 911 sont à chercher, non pas dans le mystère, celui du complexe militaro-industriel par exemple, mais dans la relation tortueuse et capitale de l'Empire britannique et de l'Arabie saoudite, nouée autour des Etats-Unis, premier Etat-nation mondial, et quand je dis autour, je pense à un étranglement menant à la mort.
Cette information essentielle, surtout si elle était creusée avec autant de perspicacité par certains chercheurs de vérité que les liens particuliers entre le 911 et telle compagnie de sécurité du WTC - ou les défaillances inexplicables de la sécurité aérienne américaine, autant civile que militaire, permettrait d'arrêter les vrais commanditaires, qui courent toujours, et sur le sol américain, voire de comprendre comment l'alliance de l'impérialisme et de l'oligarchie a permis que ce soient des alliés explicites des États-Unis qui intentent le complot, non des ennemis déclarés et surveillés - comme c'était le cas du réseau trouble et régionaliste d'al Quaeda.
Mais qui est cette al Quaeda, quand on se remémore les accusations documentées du sénateur Graham? Un réseau de jihadistes arabes censés aider les moudjahidins afghans à se battre contre les Soviétiques, puis une machine à recycler l'argent de la drogue dans le terrorisme, et le coeur des opérations troubles en la matières des services secrets saoudiens et pakistanais (alliés régionaux).
On retrouve l'ombre tutélaire des Saoudiens, en particulier des services secrets dirigés d'une main de fer par le prince Turki de 1977 à ... septembre 2001.
2001, voyons voir, juste près le 911? Oui, c'est ça. Précisons que le grand accusé dans l'affaire du 911 est le prince Bandar, qui est l'actuel responsable des services secrets saoudiens, calqués sur les institutions américaines. Graham l'accuse d'avoir financé certains des pirates présumés du 911, avec sa femme, la princesse Haifa, soeur de ... Turki. Après 2005, notre fumeux prince Bandar quitte ses fonctions d'ambassadeur.
Qui le remplace? Turki, qui avait exercé les fonctions d'ambassadeur en Grande-Bretagne depuis 2003. Nous assistons au chassé-croisé entre Bandar et Turki, qui relèvent tous deux du clan des Sudeiris. Turki a été chef des services secrets saoudiens pendant quinze ans, un record. Sa jeunesse est anglophone, tout comme celle du prince Bandar - des élites saoudiennes.
Dans cette anglophonie wahhabisée, il convient d'inclure les formations dans les universités d'élites américaines, comme Harvard, temple du renseignement et de l'esprit british sur le sol américain, et vivier des talents recrutés par la Côte est américaine pour servir de dirigeants à l'oligarchie anglophile américaine alliée à l'aristocratie dégénérée britannique, dont la Couronne est le symbole (et dont le principe Philip exprime la mentalité raciste et décroissante).
Aujourd'hui, Bandar se débattrait entre la vie et la mort, suite à une opérations terroriste menée officiellement par les services secrets syriens, en représailles de l'opération terroriste qui a décimé une partie du commandement général syrien.
Tout se passe comme si cette opération, qui n'a pu être menée sans l'appui stratégique des services russes, voire chinois, qui sont opposés à la politique atlantisto-saoudienne en Syrie, avait permis d'éliminer le représentant principal des Saoudiens sur le sol américain, la figure qui symbolise l'alliance entre l'anglophilie et le wahhabisme.
Mais qui est ce Turki, lui qui ne peut avoir ignoré de son poste de dirigeant des services secrets saoudiens les préparatifs du 911, quand on consulte la liste des agents saoudiens qui surveillaient et encadraient les pirates de l'air présumés (ce que confirme Graham)?
C'est un anglophile forcené, qui a effectué ses études en Angleterre, qui fut ambassadeur au Royaume-Uni, qui jouit d'une excellente réputation parmi les diplomates du Foreign Office et qui a pris la succession de Bandar aux Etats-Unis.
Alors que Bandar, impliqué dans le 911, aurait péri, sans le secours de ses alliés américains, qui ne pouvaient pas le lâcher visiblement, mais qui ne seraient pas fâchés d'avoir perdu ce manipulateur ultraconservateur, le visage oligarchique des Saoudiens est en train d'apparaître en étudiant le profil de Turki, lui qui a survécu au terrorisme made in al Quaeda et aux événements du Printemps arabe.
Il ne s'agit pas d'incriminer Turki comme LE commanditaire des attentats du 911. Il est l'homme des secrets d'un clan et il n'a pu agir sur le sol américain qu'avec la complicité de factions anglophiles américaines, et surtout avec l'appui de certaines factions de l'Empire britannique, des initiés de la City de Londres, de son mode de fonctionnement de paradis fiscal central, des éléments qui considèrent que l'équilibre du monde n'est valable que s'il demeure inchangé et fixe, favorable à l'oligarchie britannique.
C'est la raison pour laquelle les attentats du 911 ont été effectués : pas parce que des terroristes islamistes ont décidé de s'en prendre avec des canifs aux symboles de la puissance américaine, mais parce que des alliés des États-Unis ont décidé de détruire la puissance américaine pour perpétuer la puissance britannique.
Les Saoudiens sont des alliés séculaires de cet Empire - des nostalgiques de l'anglophilie snob et décalée. Ils sont d'autant plus en lien avec les clans américano-anglophiles des Bush&Co. ou de certains milieux de Wall Street (les banquiers de tweed) que ces gens représentent l'anglophilie historique des Etats-Unis et qu'ils détestent dans les États-Unis l'impulsion républicaine et l'indépendance vis-à-vis de cet Empire, qu'il existe politiquement ou qu'il ait mué depuis la décolonisation en force financière centrée autour de la City et de ses paradis fiscaux.
Quand on dévoile ce pan, officialisé par Graham, de l'Empire britannique alliés aux Saoudiens, on se rend compte qu'il est possible de désigner des responsables (au moins partiels) au complot du 911 - et que leur désignation tend à détruire le halo de mystère qui entourait le 911 et qui le rendait "événement surnaturel" (label déposé).
Du coup, ce surévénement, démystifié et rationalisé, devient déceptif, à la limite de l'ennuyeux. Comme si le retour au réel, au physique, faisait perdre l'attrait complotiste au complot, la valeur ajoutée que le complotisme apporte au complot : plus que l'historicité et la physique, la faculté à transcender le naturel pour lui conférer des éléments de surnaturel.
Le complotisme attribue au complot une dimension surnaturelle et irrationnelle, qui a pour inconvénient de rendre morne le retour au complot historique. A côté des hypothèses les plus audacieuses, dont certaines incriminent rien de moins que l'existence enfouie et extraterrestre des reptiliens, race hybride entre l'homme et le serpent, qui sévirait depuis l'aube de l'humanité, le retour à l'hypothèse historique du complot trop humain fait pâle figure. Plus d'origine fabuleuse, plus de familles démoniaques et tentaculaires, plus d'identité à laquelle s'en prendre - d'autant plus qu'elle se révèle cachée.
En lieu te place, la triste et implacable vérité : le complot résulte d'une alliance oligarchique entre des éléments ultraconservateurs saoudiens et britanniques, avec la complicité de cercles américains anglophiles (voire d'éléments alliés, piqués de sionisme radical).
L'autre attrait qu'apporte le complotisme est de biffer la contrainte et le désagrément qu'induit le travail par la magie du complotisme, auquel Internet a apporté un apport aussi illusoire qu'aveuglant. Quand on se meut dans cette interprétation surnaturelle, on réalise le miracle de ne plus avoir besoin de travailler : les hypothèses deviennent simples, monocausales, le travail fastidieux de l'historien pour débrouiller les fils du complot se trouve remplacé avec avantage par le recours à l'imaginaire du maléfique tout-puissant et toujours gagnant, à une hypothèse d'autant plus irréfutable qu'elle est sortie des lois de la physique, autant que de l'histoire.
L'avantage avec le surnaturel est qu'on peut tout y expliquer sans vérification, puisque ce ne sont plus les lois causales et rationnelles qui jouent les références, mais la production de l'imaginaire accommodant. Si ressurgit le désir tout-puissant et complet derrière l'imaginaire, ce dernier présente une image bien répugnante, puisque la représentation de maléfice toute-puissante, outre qu'elle légitime le mal au nom de la puissance, comme l'y appelait Nietzsche en fin de vie consciente, tend à proposer une vision de l'homme sombre, pour ne pas dire pessimiste.
Sans doute est-ce la raison pour laquelle la pensée classique se défie autant du désir comme norme, telle que l'institue l'immanentisme :
1) c'est une pensée qui nie l'extériorité à la sphère de l'homme du réel;
2) c'est une pensée qui valide et légitime le mal en tant que nécessité dominatrice.
Du coup, la négation fondamentale de la caractéristique du réel, d'être extérieur à l'homme, interdit la revendication de stabilité du complotisme et l'enferme dans son monisme, l'idée selon laquelle on ne sort pas du désir, l'on y demeure rivé dans l'immanence, engoncé tel des mouches collées à leur ruban mortifère, le postulat selon lequel le réel est fixe, figé, immobile, statique, au sens où il déploie ses linéaments sur le même plan.
1) c'est une pensée qui nie l'extériorité à la sphère de l'homme du réel;
2) c'est une pensée qui valide et légitime le mal en tant que nécessité dominatrice.
Du coup, la négation fondamentale de la caractéristique du réel, d'être extérieur à l'homme, interdit la revendication de stabilité du complotisme et l'enferme dans son monisme, l'idée selon laquelle on ne sort pas du désir, l'on y demeure rivé dans l'immanence, engoncé tel des mouches collées à leur ruban mortifère, le postulat selon lequel le réel est fixe, figé, immobile, statique, au sens où il déploie ses linéaments sur le même plan.
Le complotisme évoque le basculement de l'explication par le désir en crise. Tant que l'explication immanentiste ne sombre pas dans la crise, elle recourt à la stabilisation par son centre aveuglant, l'extériorité étant suffisamment en place pour permettre ce genre de décentrement interne - narcissique.
Quand cette extériorité se délite, loin de consacrer le triomphe de l'immanentisme, elle le détruit plutôt : le désir sans l'extériorité dont elle se désintéresse, qu'elle baptise incréé ou non-être, ne peut subsister.
Sa stabilité provisoire et éphémère ne peut tenir sans l'appoint de ce qu'elle rejette comme superfétatoire. L'explication complotiste n'est valable que dans la vérification de l'extériorité. L'intériorité seule, exclusive, débarrassée de l'extériorité, peut se permettre de délirer dans la toute-puissance de son monisme limité dans le temps de l'instantané. Dès qu'on rétablit l'existence de l'extériorité, l'interprétation complotiste révèle son aspect délirant, qui dénote deux caractéristiques :
1) le mauvais état de la structure immanentiste, qui se désagrège en ne pouvant plus compter sur son extériorité;
2) le caractère contradictoire de l'interprétation complotiste se manifeste par son instabilité dénotant son manque de pérennité.
Sa stabilité provisoire et éphémère ne peut tenir sans l'appoint de ce qu'elle rejette comme superfétatoire. L'explication complotiste n'est valable que dans la vérification de l'extériorité. L'intériorité seule, exclusive, débarrassée de l'extériorité, peut se permettre de délirer dans la toute-puissance de son monisme limité dans le temps de l'instantané. Dès qu'on rétablit l'existence de l'extériorité, l'interprétation complotiste révèle son aspect délirant, qui dénote deux caractéristiques :
1) le mauvais état de la structure immanentiste, qui se désagrège en ne pouvant plus compter sur son extériorité;
2) le caractère contradictoire de l'interprétation complotiste se manifeste par son instabilité dénotant son manque de pérennité.
L'instabilité complotiste ne fait que rédupliquer l'instabilité inhérente aux complot. Les comploteurs sont des instables qui tentent le complot avec l'illusion d'instaurer la stabilité dans l'instabilité.
De même, les anticomplotistes, les zélateurs de la thèse simpliste selon laquelle les complots n'existent pas, donc que la VO est la seule juste, en tant que l'officiel a forcément raison, sont les alliés médiatiques des comploteurs : s'ils ne se connaissent bien entendu pas tous, s'ils ne se sont pas davantage concertés à l'avance, ce qui induirait que le réel n'est pas mystérieux pour les initiés, encore une contradiction avec la théorie du mystère (mystère épais et insaisissable pour les profanes, mystère simple et simpliste pour les initiés), ils jouent la même partition, s'accordant non sur la conscience, mais sur le mimétisme : le plus fort a raison; le mystère est la conséquence du raisonnement mimétique.