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MISTRAL: TRIBUNE LIBRE À CHRISTIAN VANNESTE .....

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Ecrit le 16 nov 2014 à 13:45 par Christian Vannestedans Poing de vue
 

Mistral : la France soumise à tous les vents…

 
Photo Wikimedia Commons : Le Bâtiment de Projection et de Commandement (BPC) Mistral

Photo Wikimedia Commons : Le Bâtiment de Projection et de Commandement (BPC) Mistral

Champagne ! la France a connu une croissance de 0,3% au 3e trimestre. Trois fois plus que l’Allemagne. A force de ne plus connaître que la médiocrité, on se contente de peu.

Ces chiffres sont dérisoires. Ils ne permettront nullement de réduire le chômage.

Si l’Allemagne, manifestement victime de la politique anti-russe que les Etats-Unis imposent à l’Europe, fait moins bien, l’Espagne et la Grèce rebondissent plus (0,5 et 0,7%), à partir d’une pauvreté qui en s’accentuant est devenue plus compétitive.

Entre le nord de l’Europe, qui a procédé aux réformes structurelles nécessaires, parfois sans adopter pour autant l’Euro et le sud qui s’est imposé un régime sévère d’appauvrissement, la France n’a fait ni les réformes ni subi la cure draconienne. A son habitude, elle s’est tenue dans la voie moyenne, c’est-à-dire médiocre.

Non seulement la croissance est insuffisante, mais elle est même franchement mauvaise, puisqu’elle cache sous une légère augmentation un recul qui annonce des lendemains plus difficiles encore.

En effet, la petite croissance s’appuie sur la consommation des ménages (0,2%), et surtout sur la dépense publique de fonctionnement (0,8%). Les investissements, la création de richesse, diminuent : – 0,6% ; les investissements publics de – 1,2% et ceux de ménages, le logement essentiellement, de -1,7%. Quand on augmente la dépense sans augmenter la richesse, cela se traduit par des déséquilibres, notamment pour le commerce extérieur qui dit la vérité sur l’évolution du pays au 3e trimestre. Les exportations croissent de 0,3% et les importations de 1,2%.

Le déficit se creuse de 1,2 Milliard à 15,4 Milliards. Le solde déficitaire manufacturier est le plus élevé depuis le 3e trimestre 2011. Les importations d’automobiles ont cru de 2,9% malgré la bonne tenue des marques françaises, puisque leurs véhicules sont pour les petites cylindrées surtout fabriquées à l’étranger. Bref, nos collectivités territoriales, qui vont continuer à augmenter leurs impôts, dépensent plus et nos usines produisent moins : cherchez l’erreur !

Dans ce contexte, la vente de deux Mistral à la Russie revêt une double signification économique et politique. En effet, puisqu’il s’agit d’un contrat entre Etats, c’est la France qui subirait le coût d’une annulation. Les tergiversations assez minables de notre exécutif sur la question semblent se situer essentiellement sur le plan économique, l’alignement sur les Etats-Unis paraissant la constante politique. Soit nous dénonçons le contrat, et nous devrons rembourser la part des bateaux déjà payée par la Russie, verser en outre des indemnités, et nous retrouver avec un bateau que notre marine n’a pas les moyens d’acheter et d’utiliser, qu’aucun autre pays n’a manifesté le désir d’acheter. Les chantiers STX de Saint Nazaire seront en panne pour le second Mistral et un millier d’emplois menacés. Des problèmes annexes se poseront : les poupes ont été construites en Russie ; celle-ci considérera que la rupture du contrat lui permet d’utiliser les plans pour construire les BPC elle-même.

En outre, la crédibilité du pays sera atteinte, et son industrie d’armement touchée. Que va devenir la vente éventuelle des « Rafale » à l’Inde ? Mais, par ailleurs, la Pologne qui est à la pointe de l’opposition de l’Europe à la Russie du Président Poutine constituerait un marché de 12 Milliards ouvert à la France, avec près de 6 Milliards pour le bouclier anti-missiles de MBDA/Thalès. On voit se dessiner le chantage…

C’est sur le plan politique qu’il faut donc se situer, pour honorer le contrat avec la Russie et pour le faire avec grandeur. Il est déjà arrivé à la France de soumettre des livraisons d’armes à embargo pour des raisons politiques.

Ce fut le cas après la guerre des 6 jours, lorsque la France mit fin à la livraison de « Mirage » à Israël en 1969. On peut par amitié pour Israël regretter cette décision, mais elle correspondait à une politique qui visait à affirmer l’indépendance de notre pays à l’égard des Etats-Unis et à reprendre pied dans le monde arabe.

Cela s’est traduit d’ailleurs par de nombreux contrats de fourniture d’armement à des pays arabes. De même, aujourd’hui, la France peut affirmer son indépendance en devenant l’interlocuteur privilégié de la Russie en Europe, en disant clairement qu’elle n’est pas solidaire de la guerre froide que les Etats-Unis continuent d’entretenir avec la Russie. Mais cela implique la livraison des Mistral à la marine russe. Quant aux éternuements des pays qui, à force de craindre la Russie d’une manière pathologique, ont conduit à humilier et à ostraciser ce pays dont la fierté est prompte à réanimer le nationalisme, il faut leur donner une importance limitée. Ce sont les mêmes qui ont suivi aveuglément l’Amérique dans son aventure irakienne, quand la France avait vu juste.

 

On se souvient de la réponse cinglante de Chirac aux deux lettres adressées par 10 et 8 pays candidats à l’Union Européenne et membres de celle-ci, et dont il apparaissait clairement qu’ils agissaient comme clients de l’oncle Sam.

 

Enfin, en matière de ventes d’armes, la solidarité européenne est un vain mot : la Pologne est équipée en F16 américains, l’Allemagne, le Royaume-Uni, l’Italie et l’Espagne réalisent l’Eurofighter , le rival heureux du Rafale, et le suédois Gripen NG de Saab vient de s’imposer au Brésil.

Si les alliances industrielles sont parfois efficaces, dans un domaine de grande concurrence, il n’y a aucune raison pour que l’alignement de notre pays soit un handicap supplémentaire.

 

Il faut au contraire à la fois pratiquer l’indépendance politique et le souci de nos intérêts économiques, l’un en premier, l’autre en second.

La livraison des Mistral les réunit à l’évidence.


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