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ARMÉE: LE SILENCE DES CHEFS MILITAIRES ???

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LETTRE ASAF 14/10 : Les chefs militaires doivent parler


Ils vont le faire prochainement, comme tous les ans, à l’occasion de leur audition par les commissions parlementaires de la Défense.

Ils vont le faire prochainement, comme tous les ans, à l’occasion de leur audition par les commissions parlementaires de la Défense. Mais leurs propos ne seront guère connus, à moins que les médias ne les invitent à s’exprimer sans « langue de bois » sur les missions que remplissent nos forces en opération, leurs capacités, leurs insuffisances et leur moral.

Les chefs d’état-major en ont la légitimité, la compétence et aujourd’hui le devoir, tant la situation de nos unités est critique. Ils en ont aussi le droit. C’est ce qu’a rappelé monsieur Kader Arif, secrétaire d’Etat aux Anciens combattants, en réponse à une question posée par l’ASAF à ce sujet.

 

Pourquoi parler aujourd’hui ?

L’armée, bien que très appréciée, est méconnue de la Nation et la suspension du service national est loin d’en être la seule cause.


Depuis 30 ans, l’armée n’a cessé de se contracter comme peau de chagrin au point, qu’aujourd’hui, plus d’un tiers des départements n’a plus de garnison ! En 10 ans, entre 2009 et 2019, terme de la loi de programmation militaire en cours, l’armée professionnelle aura perdu 80 000 personnes soit le quart de ses effectifs.


Simultanément les multiples engagements opérationnels  contribuent à accentuer les méfaits de cette désertification militaire par l’absentéisme qu’ils induisent dans les garnisons.


Enfin, les restrictions financières se traduisent par une paupérisation des unités telle que, pour la plupart d’entre elles, les colonels n’ont plus les moyens d’accueillir les groupes scolaires ou de cadres civils qui désirent connaître et comprendre le fonctionnement de leur régiment ou de leur base. Dans ces conditions,  ne soyons pas surpris que les échanges avec la population et la connaissance réciproque civilo-militaire soient hélas parfois réduits à néant.

Cette situation est renforcée par le silence médiatique qui entoure le volet  militaire de nos engagements extérieurs au nom d’un pseudo « secret défense ». Comment les Français peuvent-ils comprendre ces opérations et leur justification en une minute au journal de 20 heures, au cours duquel  leur est présentée la vidéo d’un tir guidé laser en Irak, ou l’explosion d’une roquette tirée par un hélicoptère d’attaque Tigre au Mali ? Et s’ils ne comprennent pas ce qui se joue « là-bas », comment peuvent-ils soutenir leur armée ?

Pourquoi  n’y a-t-il plus aucun reportage sur la RCA où la France engage plus de 2 000 de ses soldats dans des conditions souvent « acrobatiques » ? Pourquoi ne pas annoncer et commenter davantage les succès de nos forces au Mali ?

 

Les chefs militaires doivent parler car ils en ont la légitimité

Ce sont eux qui commandent les soldats dans les opérations et engagent éventuellement leur vie. Ils connaissent les réalités opérationnelles, les forces et les faiblesses de notre armée mieux que quiconque. Ils connaissent bien les hommes et les femmes qui sont sous leurs ordres car, au cours de leur carrière, ils ont tous partagé pendant plusieurs années leur quotidien, leurs souffrances et leurs sacrifices. Par ailleurs, les  hauts responsables militaires ont une vision à long terme de leur action ; ils  ne sont pas soumis à des échéances électorales à très court terme…  Ils savent aussi qu’avec la conduite d’opérations qui s’inscrivent dans la durée, la préparation du futur à horizon de 20 ou 30 ans est une  préoccupation majeure. C’est d’autant plus vrai que leur formation est nourrie par une expérience de trois décennies de service, et que la vie des matériels majeurs s’étend sur près d’un demi-siècle.

 

Les chefs doivent parler car il y a urgence

Une armée est d’abord un corps hiérarchique dans lequel chacun remplit sa tâche en toute confiance. Cette dernière s’acquière, se développe et se renforce, dès le  temps de paix, dans la vie quotidienne, lors de l’instruction et l’entraînement. Le subordonné doit avoir toute confiance dans son chef et réciproquement. C’est à l’aune de cette confiance réciproque que se mesure la valeur d’une troupe ou d’un équipage. Or, la situation est aujourd’hui si critique que la confiance est menacée.

L’armée, que les réorganisations successives et incessantes ont tronçonnée, complexifiée et affaiblie, doute d’elle-même. Méconnue de l’opinion, sans cesse pressurée sur le plan des effectifs, contrainte excessivement sur le plan financier et pourtant employée à 120%, comme l’a rappelé récemment le chef d’état-major des Armées, elle perd confiance dans ses chefs qui souvent, avec les nouvelles structures et contraintes, ne peuvent plus résoudre les problèmes de leurs subordonnés qui relèvent en principe de leur responsabilité. Le commandement pourrait se trouver ainsi rapidement contesté et voir s’estomper la confiance de la troupe s’il n’obtient pas des améliorations rapides dans les domaines des conditions de vie et de travail.

 

La situation est bien plus grave qu’il n’y paraît

L’état des armées présente à court terme un tel risque d’implosion qu’il est urgent d’arrêter la spirale infernale qui menace leur cohésion. Parce que la classe politique continue d’ignorer les besoins réels de son armée, il appartient aux chefs militaires de l’expliquer à l’opinion. Cela n’effacera en rien la responsabilité personnelle des dirigeants politiques.

Le haut commandement se doit donc d’intervenir avec force et clarté pour que les Français prennent conscience de la gravité de la situation, faute de quoi ceux-ci la découvriront lors d’évènements graves, dont la résolution nécessitera alors, une armée robuste et disciplinée qu’ils n’auront plus !

LA REDACTION

 

Merci Michel M.

 

 

Commentaires (6)

  • Jean-Bernard COMTE

    15 octobre 2014 à 18:09 |
    Situation très inquiétante. Lorsque la base n'a plus confiance dans sa hiérarchie, tout est possible !
    Même constant dans l'industrie. Allez donc faire avancer un groupe après cela !!!
  • jallas

    16 octobre 2014 à 15:31 |
    Membre de l'ASAF je regrette l'attitude trop timorée à mon gré de ses dirigeants. Il me semble que seule une manifestation - analogue à celle de la manif pour tous - des militaires en retraite ou ayant été militaires serait à même de convaincre les pouvoirs publics de modifier leur politique de désintégration de notre Défense.
    (Il est totalement illusoire de compter sur les chefs militaires en fonction.).
    • Martin

      23 octobre 2014 à 20:17 |
      Je partage tout à fait cette opinion.
      Écrire est un plaisir personnel, mais sans considération de nos gourvernants.
      Parler, même devant nos gouvernants n'apporte rien,ils ne bouge que lorsqu'il y a blocage du paysan ors oui ã une manif d'anciens et des ascendants de nos filles et garçons sous le drapeau
  • Allobroge

    17 octobre 2014 à 17:36 |
    Ils doivent mais le feront ils ? Et les politiciens leur laisseront ils l'opportunité surtout si les militaires sont critiques et comment ne pourraient ils pas l'être, eux à qui on détruit l'outil de travail.Il faudra bien un jour que ceux qui nous gouvernent depuis plus de 30 ans prennent conscience que la variable d'ajustement budgétaire est arrivé au bout, que l'élastique va casser si ce n'est déjà fait !
  • Plume

    23 octobre 2014 à 19:33 |
    Oui, ils doivent le faire. Mais cela changera-t-il quelque chose ?
  • PYD

    25 octobre 2014 à 12:42 |
    Ceux d'actives peuvent parler, mais souvenez-vous de ce général de gendarmerie "écarté" pour avoir donné son opinion. Il y eut aussi des collectifs anonymes de gendarmes et de de militaires (les trois autres corps) qui publiaient des billets sous l'ancienne présidence et il me semble qu'ils ont été "traqués".
    Alors parler pour quel résultat? Il faut être entendu par le peuple qui est attaché à son armée et désinformé sur la situation.
    La commission de la défense est, selon moi, un bureau de comptables cherchant à encore plus désagréger l'armée sans que ça se voit (trop).
    Un mouvement populaire peut être une solution mais ne doit pas être récupérer politiquement.

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