Le collectif Sauvons Calais invite l’ultra-droite à son rassemblement dimanche
Publié le 04/09/2014
Le collectif Sauvons Calais veut manifester dimanche à 14 h place d’Armes contre « l’invasion de migrants ». Il invite des personnalités de l’ultra-droite et attend entre 400 et 800 militants.
Le préfet du Pas-de-Calais n’a pas, pour le moment, prononcé l’interdiction du rassemblement alors que dans un contexte similaire, il avait interdit la dernière manifestation programmée en avril.
Le contexte
Ces derniers mois, les démantèlements successifs de camps et de squats ont poussé les exilés à se réfugier zone des Dunes où ils vivent dans le dénuement.
La tension entre les ethnies a entraîné des bagarres générales. Les exilés tentent aujourd’hui le passage clandestin en force, investissant les camions approchant le port.
Impuissante, la maire de Calais a proposé la création d’un centre d’accueil pouvant héberger jusqu’à 400 migrants. Mardi, le ministre de l’Intérieur Bernard Cazeneuve a approuvé la seule mise en place d’un accueil de jour à Calais.
Depuis la création en novembre 2013 de la page Facebook anti-migrants « Sauvons Calais » et celle de « Calais Ouverture, Humanité », solidaire des exilés, deux positions s’affrontent. Pour compliquer davantage une situation très délicate, les groupes d’extrême droite et d’extrême gauche se sont emparés de la question des migrants.
L’objectif de Sauvons Calais
Sauvons Calais veut créer un rassemblement ce dimanche pour « expliquer ce qu’est devenue la situation calaisienne avec l’immigration et ce que vivent les Calaisiens depuis», détaille Kévin Reche, porte-parole du collectif Sauvons Calais. Il dénonce aussi « l’invasion de migrants».
Les controversés invités de la manifestation
Le secrétaire général du Parti de la France (parti politique nationaliste fondé par Carl Lang), Thomas Joly, ex-membre du Front national, prendra la parole.
Sur son blog, l’ancien conseiller régional de Picardie s’est réjoui de la libération d’Esteban Morillo, sympathisant du groupuscule d’extrême droite et principal suspect dans la mort du militant antifasciste Clément Méric.
Sera présent aussi
Yvan Benedetti, conseiller municipal de l’opposition à Venissieux sous la bannière « Venissieux Fait Front ».
Il s’est indigné sur Twitter de la dissolution annoncée par Manuel Valls en 2013 de l’Œuvre française, mouvement nationaliste d’extrême droite dont il a été le président.
Simonne Deldreve sera présente. Elle est la présidente des Bleuets calaisiens, une association qui vient en aide aux personnes sans domicile fixe avec pour slogan « Défense des nôtres avant les autres et surtout les Calaisiens et Calaisienne ».
Richard Roudier, responsable du réseau Identités, conclura les prises de paroles.
Son réseau dit « œuvrer pour des régions autonomes, dans une France forte et une Europe souveraine, afin de protéger notre civilisation». Le réseau parle de « stopper l’immigration humaine et culturelle qui tend à transformer l’Europe en une société multiethnique».
Un tournoi de football pour les migrants
Les associations ont choisi de proposer dimanche un tournoi de football à 14 h à la citadelle. « Il y aura de la musique, un espace goûter, précise Maël Galisson, coordinateur de la Plateforme de service aux migrants (PSM), qui regroupe une majorité d’associations d’aide aux migrants. L’idée est de créer la rencontre entre les migrants et la population, là où Sauvons Calais veut mettre des barrières.» Un contre-pied sur fond d’inquiétudes. « Nous sommes inquiets à deux niveaux, détaille Maël Galisson. Nous avons des craintes qu’ils s’en prennent physiquement aux exilés, que ceux-ci deviennent des cibles.» Le coordinateur de la PSM rappelle que Sauvons Calais a créé sa page Facebook après l’appel du maire de Calais à signaler la présence de squats dans la ville. « Ça a été une porte entrouverte par Sauvons Calais qui s’est installé comme vitrine de la population calaisienne. Heureusement, grâce au travail des militants et de certains journaux, on s’est aperçu que Kévin Reche s’est fait tatouer une croix gammée, qu’il a posé en compagnie du Front national», analyse-t-il. Il précise : « On s’aperçoit que Sauvons Calais n’est plus une simple page Facebook mais bien un groupe d’extrême droite radicale qui porte des idées xénophobes. Ils veulent les diffuser dans des rassemblements et sont passés à la vitesse supérieure avec des agressions verbales et physiques.»
Des syndicats et partis politiques ont manifesté leur soutien à la PSM. Interrogé sur des agressions racistes que l’on prête à son collectif, Kévin Reche, porte-parole de Sauvons Calais indique : « Déjà je demande que toutes les personnes qui disent ça apportent des preuves que ce sont bien des membres de Sauvons Calais qui en sont à l’origine. Nos membres ne sont pas violents, ils disent cela pour rabaisser le mouvement». Il ajoute qu’il « n’exclut pas qu’il y ait des migrants agressés mais pas par des personnes du collectif. Si c’est par des skinheads, ce n’est pas nous, on est différent d’eux.»
C. T.
Manifestation des exilés
Un communiqué signé des communautés de migrants de Calais annonce une manifestation prévue ce vendredi. Le départ sera donné à 15 h du quai de la Moselle et se terminera sur la place d’Armes. Les migrants veulent manifester pour témoigner « des nombreuses violences policières. Certains d’entre nous ont eu des mains et jambes cassées et d’autres ont été blessés à la tête».
Ils font part de leur peur : « Nous ne pouvons pas croire que la police nous protègera de Sauvons Calais puisque nous subissons déjà beaucoup de violence de leur part. » Ils rappeleront qu’ils revendiquent des droits et des conditions de vie dignes.
C. T.
Que décidera la préfecture ?
Denis Gaudin, le sous-préfet de Calais, a rappelé qu’en face d’une déclaration de manifestation, « le pouvoir public peut soit l’interdire, soit rester silencieux, ce qui dans ce cas signifie qu’elle peut avoir lieu.» La préfecture du Pas-de-Calais a précisé pour le moment « que la manifestation de Sauvons Calais n’est pas interdite mais s’il y a une menace de trouble à l’ordre public (appel à la violence par exemple), cela peut changer et être annulé jusqu’à ce qu’elle ait lieu.»
La préfecture indique que Sauvons Calais a prévu un service d’ordre. « J’ai vu hier le sous-préfet, il m’a fait comprendre qu’il n’interdirait pas ce rassemblement, qu’il fallait rester sur la place d’Armes et faire attention aux contre-manifestations puisque les anti-fas prévoient d’investir la place d’Armes avant nous à 13 h, explique Kévin Reche, porte-parole du collectif Sauvons Calais.
J’ai dit au sous-préfet qu’il n’y aurait pas de violence et que nous voulons nous montrer exemplaires.» En avril, le préfet avait fait annuler la manifesation de Sauvons Calais. Denis Robin avait alors déclaré : « Kévin Reche a déjà tenu des propos extrémistes et d’incitation à la haine, accompagnés de dégradations importantes sur une habitation squattée par les No Borbers lors d’un précédent rassemblement devant une habitation à Coulogne en février.
Parmi les manifestants extérieurs figurent certaines personnes connues pour des faits de violences lors d’attroupements ou de propos incitant à la discrimination et à la haine raciale ainsi que des responsables de la mouvance ultra-droite.»
C. T.
La voix du Nord.fr