Paris: Automobilistes et taxis visés par des «attaques de diligence»
FAITS DIVERS - Plusieurs bandes se sont spécialisées dans les attaques violentes et rapides de véhicules coincés dans les embouteillages à l'entrée de la capitale...
Il manque quelques troncs d’arbres en travers de la chaussée. Mais il n’empêche, par moment, l’autoroute A1 prend des allures de Far West.
A la manière des attaques de diligence rendues célèbres par Morris dans Lucky Luke, des bandes de jeunes se sont spécialisées dans le braquage de voitures et taxis coincés dans les embouteillages à l’entrée de Paris.
«On sait qu’il y a deux à trois équipes qui tournent sur ce créneau», confirme Patrick Lunel, commandant de la Compagnie de sécurisation et d’intervention (CSI) en Seine-Saint-Denis.
Leur terrain de prédilection se trouve juste avant le tunnel du Landy qui mène au périphérique parisien. Le mode opératoire est toujours le même.
Alors que les véhicules sont coincés dans les embouteillages –fréquents à cet endroit– l’un des jeunes entre à pied sur l’autoroute, casse la fenêtre du véhicule ciblé, attrape un sac à mains ou un téléphone et s’enfuit en courant via la bande d’arrêt d’urgence pour s’évanouir dans les cités environnantes.
Localisation du Tunnel du Landy à l'entrée de Paris.
80% des braqueurs sont de très jeunes mineurs de 13 ou 14 ans
«Le phénomène des vols à la portière existe depuis longtemps.
Mais c’est un vrai fléau local, assure, de son côté, Christian Meyer, Commissaire divisionnaire en Seine-Saint-Denis.
Si l’on ajoute les car-jackings classiques, ce type de braquages sur les routes représente des centaines de faits par an.
Nous avons donc décidé il y a un an de créer un groupe spécialisé pour lutter contre le phénomène.»
Surveillance photo, écoutes, police technique et scientifique: les moyens déployés ont permis d’arrêter 165 auteurs de faits en 2013. «80% d’entre eux sont de très jeunes mineurs de 13, 14 ou 15 ans», poursuit le commissaire.
«Et ils sont passés professionnels dans l’art de cibler les véhicules intéressants», confirme Patrick Lunel.
La vitre arrière fracassée à l’aide d’une pierre
Joseph Clerville peut en témoigner. Employé par les Taxis bleus depuis six ans, il est traumatisé depuis ce dimanche soir pluvieux de novembre. «Je venais de prendre un couple de touristes asiatiques à Roissy, raconte-t-il.
On était dans les bouchons quand j’ai vu dans mon rétro un homme qui marchait sur l’autoroute.»
Le temps de s’interroger sur sa présence, Joseph Clerville a entendu le bruit sec de sa vitre arrière se brisant en mille morceaux. «Il l’a fracassée avec une grosse pierre, a attrapé le sac à main de la touriste et s’est cassé sur le côté. Ça fait vraiment très peur!»
En l’espace de quelques années, les chauffeurs de taxis ont appris à prendre leur précaution.
«Le phénomène est connu, confirme une porte-parole du groupe de taxis G7.
Les chauffeurs diffusent un message radio quand ils aperçoivent un homme à pied sur le côté.
D’autant qu’a priori, une nouvelle bande sévit en ce moment…» La police se demande d’ailleurs si une équipe de jeunes n’est pas carrément chargée de repérer les voitures les plus intéressantes dès la sortie de Roissy et de prévenir leurs complices qui patientent dix kilomètres plus bas.
Le sac à main «un peu trop voyant» sur le siège passager
«C’est toute une industrie qui a été mise sur pieds, poursuit le commissaire Meyer. L’an dernier, nous avons démantelé un réseau de receleurs qui opérait depuis la gare de Saint-Denis.
Cela a déstabilisé les bandes de braqueurs pendant six mois.
Elles utilisaient ce réseau pour écouler vers la Belgique et le Maroc les marchandises volées dans les voitures…»
Aujourd’hui, les policiers n’hésitent pas à faire revenir les victimes au commissariat pour leur présenter des séries de photo. «On a réussi de cette manière à impliquer un jeune sur une quinzaine de faits.»
Car les jeunes détruisent systématiquement et méthodiquement les caméras installées sur le bord de l’autoroute.
«Le mieux, c’est encore de faire de la prévention auprès des conducteurs», conclut Patrick Lunel.
Le commandant de police a ainsi demandé à ses hommes de ne pas hésiter à arrêter les conductrices dont le sac à main serait «un peu trop voyant» sur le siège passager.
«Ca ne coûte rien de le mettre dans le coffre…»
Source et publication: http://www.20minutes.fr/article/1277194/ynews1277194?xtor=RSS-176