HISTOIRE DU FRONT NATIONAL
De Dominique Albertini et David Doucet
Pierre LE VIGAN
le 10/09/2013
Le Front national, de petit groupe de quelques centaines à peine de sympathisants au début des années 1970, avec 0,7 % des voix aux présidentielles de 1974, et 0,33 % aux législatives de 1978 (il est vrai avec seulement 160 candidats et un peu plus de 1 % là où il était présent), est monté depuis les années 80 à 10 % puis souvent 15 % des voix à partir des années 90.
A l’exception des législatives de 2007 (4,5 % des voix, après un petit 11 % en 2002) il est toujours à environ 15 % : 17,9 aux présidentielles de 2012, 14,5 aux législatives de la même année.
Marc Crapez estime qu’avec un rythme de progression aussi lent, le FN en a pour un siècle avant d’arriver au pouvoir.
Pas sûr toutefois que son côté incontournable n’ait d’autres effets : une recomposition complète de la vie politique, et une redistribution des cartes.
Le Fn a aussi beaucoup changé : il est devenu moins petit bourgeois et plus populaire, plus ouvrier même, et ce depuis 1995.
En outre la succession gagnée par Marine Le Pen (comment aurait-elle pu ne pas la gagner ?) a infléchit la culture politique du Front.
Exit les Jean-François Chiappe, et les Jean Mabire. Exit la droite littéraire et pétrie d’histoire.
Ce n’est pas seulement une question de « marinisation ». C’est aussi une question d’époque : le FN est de son temps, et c’est finalement un parti comme les autres sans l’être encore tout à fait, car il y a encore plus de coups à prendre que d’avantages à récolter.
Le parti est donc devenu plus laïque, franchement hostile à tout « néo-fascisme » et à tout antisémitisme, et populiste sur une ligne « ni droite ni gauche », bien éloignée de la « droite nationale, sociale et populaire » qui avait, trente ans durant, été sa référence.
C’est avec objectivité et précision que cette histoire est racontée par 2 journalistes, peu favorables au Fn au demeurant.
Il n’y a guère de points où on peut les prendre en défaut (Les GNR de Duprat étaient en fait les GNR de base, - GNRB -, et l’expression employée était les « grenebeu »).
Au-delà des faits relatés, la logique des inflexions est généralement bien analysée.
On peut juste regretter certaines surinterprétations.
Le fait qu’il y ait eu un « banquet des 1000 » organisée par la nouvelle présidente du Front en 2011 n’est vraiment pas une réminiscence du banquet des 1000 du 14 mars 1948 en faveur d’un arrêt de l’épuration et d’une réintégration des exclus dans la vie civique.
Qui veut trop prouver se trompe souvent.
Dominique Albertini et David Doucet, Histoire du Front national, préface de Nicolas Lebourg, Ed. Tallandier, 360 pages, 20,90 €.
Source et publication: http://metamag.fr/metamag-1523-Histoire-du-Front-national-De-Dominique-Albertini-et-David-Doucet.html