Le Point.fr - Publié le 20/05/2013 à 13:49 - Modifié le 20/05/2013 à 14:08
Charles Consigny met les points sur les i : ces jeunes sont venus pour tout casser parce qu'ils n'ont rien à faire et ne savent rien faire d'autre.
Le 13 mai au Trocadéro, des casseurs ont fêté à leur manière la victoire du PSG. © Rafael Yaghobzadeh / Sipa
Un après-midi de mai, je téléphonais à un ami du Point pour des raisons d'affaires, et mon interlocuteur m'interpella sur le papier "crépusculaire" que venait de publier le vénérable et vénéré Jérôme Béglé, rédacteur en chef de ce site.
Je suis allé lire ce texte que j'imaginais terrible, fruit noir de la déprime de notre patron face au déferlement de violence qui a eu lieu voici une quinzaine de jours au Trocadéro.
Son réquisitoire inquiet m'a semblé assez soft.
Lorsqu'il s'agit d'aborder un sujet qui fâche, route verglacée où l'on n'est jamais à l'abri d'un dérapage forcément suivi d'une vindicte germanopratine, les journalistes s'embarrassent de mille circonlocutions, comme s'ils craignaient le jugement de Pascale Clark.
Que s'est-il passé au Trocadéro ?
C'est pourtant simple : des hordes de "jeunes de banlieue", selon l'expression consacrée, pleins de haine et forts de leur impunité, sont venus tout casser parce qu'ils n'ont rien d'autre à faire et qu'ils ne savent rien faire d'autre.
Une jeunesse humiliée ? Mais par qui ?
Le réel est dur, mais c'est le réel. Les médias et le gouvernement ont d'abord tenté de le dissimuler, invoquant des "ultras" et autres enfiévrés des stades, et ce qu'on entendait ne correspondait pas à ce que l'on voyait.
La "plenelocratie" eût été trop contente qu'il se soit agi de supporteurs habitués aux excès, comme elle avait été rassurée, aux premiers soubresauts de l'affaire Merah, de pouvoir affirmer que le massacre était le fait d'un militant d'extrême droite catholique intégriste, avant de se rendre à l'évidence des résultats de l'enquête.
Le confrère Béglé évoque une jeunesse "humiliée". Mais par qui ?
Par l'État qui fait des plans à 30 milliards pour essayer de la refaire entrer dans la cité (au sens grec) ?
Par les responsables politiques qui n'ont jamais de mots assez tendres pour les délinquants ?
Par la jet-set médiatique qui s'ébahit devant les vociférations grotesques des rappeurs ?
Par Sciences Po qui crée des passerelles hors-concours ?
Par Areva qui se félicite de recruter en priorité les candidats "diversité" ?
Il affirme que cette jeunesse, si elle vient tout casser, c'est pour "rappeler qu'elle existe". Mais doit-elle le faire ?
Si chaque catégorie de la population devait en permanence rappeler qu'elle existe de cette façon-là, tout le pays serait à feu et à sang la moitié de l'année.
Débats aveugles
L'accusation est vite portée, contre la France, d'avoir "parqué" cette jeunesse en banlieue. Refrain éculé et amnésique, qui fait mine de ne pas se souvenir que la banlieue, avant qu'on y casse tout, était un lieu de vie paisible, avec des magasins, des médecins, des gens différents les uns des autres.
Indéfiniment, les élites françaises se cachent derrière leur petit doigt. Quelques hommes de courage, aussitôt repeints en fascistes, alertent le pays sur ce qui advient (Finkielkraut, Zemmour, Renaud Camus, Sarkozy 2012, etc.) tandis que les éditorialistes étrangers se gaussent de nos débats aveugles et de l'attachement que nous portons à nos vieilles lunes.
Nous continuons avec l'immigration de masse, nous continuons à livrer l'éducation nationale aux syndicats d'enseignants, l'entreprise aux syndicats de salariés, la fonction publique aux syndicats de fonctionnaires, nous continuons avec les 35 heures, la décentralisation, l'inflation législative et l'obésité réglementaire, et nous déplorons les effets dont nous chérissons les causes - ce qui fait, pour Bossuet, que Dieu se rit de nous.
Source et publication: http://www.lepoint.fr/invites-du-point/charles-consigny/y-a-t-il-eu-des-barbares-au-trocadero-20-05-2013-1670321_1449.php#xtor=EPR-6-[Newsletter-Quotidienne]-20130521