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XIV ème SOMMET DE LA FRANCOPHONIE !

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mercredi 10 octobre 2012

A propos du XIVème sommet de la Francophonie qui se tiendra à Kinshasa du 12 au 14 octobre

 


En 1991, le IV° sommet de la Francophonie initialement prévu à Kinshasa fut finalement déplacé à Paris en raison des problèmes que connaissait alors le Zaïre. Depuis, redevenu la RDC, ce pays n’a cessé de s’enfoncer dans le néant. C’est pourquoi il est insolite que s’y tienne le XIV° sommet des Etats francophones ; d’autant plus que le climat s’y est considérablement tendu ces derniers jours, tant en raison des appels à manifester lancés par l’opposition, que par la détérioration des relations avec la France. Au cœur du contentieux se trouve la réélection du président Kabila en 2011, scrutin contesté en raison de nombreuses fraudes constatées par les observateurs de l’Union européenne.
Ce sommet est important pour le président congolais, personnage effacé et même falot qui compte sur lui pour s’imposer sur la scène régionale face aux trois « géants » que sont les présidents Dos Santos d’Angola, Museveni d’Ouganda et Kagamé du Rwanda. Or, à quelques heures de l’ouverture, et semblant ignorer les règles les plus élémentaires du savoir-vivre africain, François Hollande a humilié son hôte en dénonçant publiquement les violations des droits de l’homme commises dans son pays. Le président Kabila s’attendait certes à devoir essuyer des reproches de la part du président français, mais il pensait que ce dernier attendrait pour les exprimer la réunion à huis clos qui réunira la vingtaine chefs d’Etat annoncés et lors de laquelle seront abordées la question du Mali et la situation dans l’est de la RDC. Les partisans du président Kabila feront certes bonne figure au chef de l’Etat français, mais ils ne lui pardonneront pas cet affront.
D’autant plus que l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS), le parti de l’opposant Etienne Tshisekedi, aujourd’hui âgé de 80 ans, veut profiter de l’occasion pour dénoncer la « mascarade électorale » de 2011 et que, dans l’entourage de François Hollande, certains s’activent depuis des semaines pour organiser une rencontre entre les deux hommes. Ainsi encouragés, les opposants vont immanquablement descendre dans la rue. Aussi, pour ne pas voir « son » sommet gâché par des manifestations, le président Kabila va donc donner des consignes de fermeté aux forces de l’ordre, ce qui risque de déboucher sur de véritables émeutes.
 
Au-delà de ce sommet dont le faste est égal à l’inutilité, quelle est encore la place de la France dans l’Afrique sud saharienne ?
Le mythe de la « françafrique » qui a la vie dure continue à être entretenu par des groupuscules ou des ONG dont il constitue le fonds de commerce. Or, les relations entre la France et l’Afrique ont considérablement changé depuis que la première n’est plus qu’une entité au sein de l’Union européenne, ce qui, par la force des choses, a enterré le bilatéralisme. La présence française en Afrique sud saharienne a  évolué dans tous les domaines :
 
- De moins en moins d’expatriés y vivent, les évènements du Congo Brazzaville d’abord, ceux de Centrafrique et du Tchad ensuite et enfin ceux de Côte d’Ivoire, ayant eu pour conséquence le départ de la plupart d’entre eux. Aujourd’hui, 50% des ressortissants français vivant en Afrique sont des binationaux.
 
- Contrairement à ce qui est affirmé par les héritiers du tiers-mondisme,  l’Afrique sud saharienne ne représente plus qu’entre 2 et 3% du commerce extérieur de la France. A eux seuls, les trois pays du Maghreb (Maroc, Algérie et Tunisie) ont un poids égal au reste du continent.
 
- Les implantations françaises ne sont plus les mêmes qu’il y a une décennie. C’est ainsi que les parts de marché de la France dans la zone CFA sont tombées à moins de 20%. Cette fameuse zone présentée par certains comme étant une rente pour la France, commerce donc pour près de 80% avec d’autres pays qu’elle. Pour la France, le Maroc est à lui seul un partenaire commercial plus important que toute la zone franc.
 
- La France n’a plus de « chasses gardées » en Afrique. Ainsi, le Gabon, sur lequel tant d’inepties ne cessent d’être colportées, n’était-il en 2010 que son 74° partenaire commercial. Avec moins d’un milliard d’euros d’échanges cumulés, il ne fournissait que 0,1% de toutes les importations françaises et 0,5% de ses besoins pétroliers.
 
- Les trois premiers partenaires commerciaux de la France en Afrique sud saharienne n’ont jamais fait partie de son empire colonial puisqu’il s’agit de la République sud-Africaine, du Nigeria et de l’Angola avec lesquels Paris a un volume d’échanges plus important qu’avec toute la zone franc.
 
- Militairement, la France n’est plus le gendarme de l’Afrique. Ses effectifs au sud du Sahara qui étaient de 30 000 hommes en 1960, de 11 000 en 2006, n’étaient plus que de l’ordre de 5000 en 2009, stationnés sur ses trois dernières bases, à savoir 2900 hommes à Djibouti, 1150 à Dakar et 800 au Gabon. Depuis, plusieurs implantations ont été fermées, notamment en Côte d’Ivoire. La France est cependant toujours présente dans le cadre de missions ponctuelles d’assistance ou d’intervention.

Bernard Lugan
14/10/12
 

mercredi 3 octobre 2012

L'Afrique Réelle N°34 - Octobre 2012

 
Sommaire :

Actualité : 
- Kenya : Kikuyu contre Luo et Orma contre Pokomo
- Somalie : La victoire des Hawiyé

Dossier : Quel avenir pour la Libye ?

Editorial de Bernard Lugan :

Mali : quatre réflexions « utiles » avant le déclenchement de l’offensive

Avant de déclencher l’intervention militaire programmée et nécessaire, quatre points méritent réflexion :
1) Au long des siècles, l’Islam s’est peu à peu imposé dans tout l’Ouest africain sahélien aux dépens des peuples animistes dont les constructions politiques furent détruites et les populations régulièrement mises en servitude. Au XIe siècle, les Almoravides disloquèrent ainsi le royaume soninké de Ghana. L’islamisation s’enracina ensuite à l’époque des empires du Mali et du Songhay. Puis, à partir des XVIIe-XVIIIe siècles, vint le temps des jihad qui se succédèrent de l’Atlantique au lac Tchad. A l’Ouest, les principaux furent celui des Toucouleur qui aboutit à la constitution de l’empire d’al Hadj Omar dans la partie occidentale du Sahel et celui des Peul de Shekku Ahmadu qui s’étendit dans la vallée moyenne du Niger. Plus à l’est, l’empire Peul-Haoussa de Sokoto fut fondé par le jihad d'Osman dan Fodio au début du XIXe siècle dans le nord du Nigeria, zone actuelle d’opération de Boko Haram. Qu’il s’agisse de Boko Haram, d’Aqmi, du Mujao ou encore d’Ansar Eddine, les actuels courants fondamentalistes sahéliens s’inscrivent tous clairement dans la tradition de ces jihad.

2) À la faveur des évènements survenus dans le nord, les islamistes ont pris le contrôle du sud du Mali où, et ne l’oublions pas, il y a moins de 150 ans, le royaume animiste bambara résistait encore à l’islamisation et où la conversion intégra nombre de pratiques antérieures. Aujourd’hui, ce qui faisait l’originalité des « islams noirs » est en passe d’être éradiqué car, face au vide politique, le Haut-conseil islamique, d’obédience rigoriste, s’est en effet imposé à Bamako comme étant le vrai pouvoir. Le HCI a ouvert des négociations directes avec Ansar Eddine duquel il n’est en réalité séparé que par de légères et subtiles divergences d’interprétation du Coran. Le HCI et Ansar Eddine étant tous deux en faveur du respect de l’intégrité des frontières du Mali, un terrain d’entente a donc été trouvé et cela d’autant plus que les négociateurs du HCI ne demandaient à leurs interlocuteurs nordistes que quelques concessions de détail concernant l’application de la charia.

3) Face à l’offensive militaire de la CEDEAO, les islamistes nordistes sont donc divisés puisque, comme je viens de le dire, les plus réalistes ont déjà quasiment accepté une forme de ralliement qui isolera encore davantage la fraction la plus intransigeante désormais réduite à des groupuscules rassemblant moins de 300 « véritables » combattants. Quant aux Touaregs du MNLA, comme ils ne sont plus en mesure d’imposer leur revendication indépendantiste, ils sont donc condamnés à négocier leur ralliement à Bamako en échange de concessions politiques. Ils vont donc jouer en quelque sorte le rôle de supplétifs nordistes de la future offensive que prépare la CEDEAO. Peut-être en profiteront-ils pour régler « discrètement » leurs comptes avec les islamistes quand, dispersés dans les immensités désertiques, ces derniers chercheront à se mettre à l’abri de frontières poreuses.

4) La reprise de Tombouctou et de Gao ne changera rien au fond du problème qui est que les populations nordistes ne veulent plus être soumises à celles du Sud. A défaut d’un redécoupage frontalier refusé par toutes les parties, à l’exception des Touareg, la reconnaissance de l’autonomie des trois Azawad est donc une nécessité. Pour mémoire, il s’agit de l’Azawad touareg, de l’Azawad maure et de l’Azawad du fleuve à la population composite. Faute de quoi, les mêmes causes produisant les mêmes effets, le nord du Mali ne tardera pas à refaire l’actualité…
 

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