Du culot à revendre.
Contrairement au cambrioleur qui cherche la discrétion à tout prix, l’arnaqueur n’a pas peur d’agir au grand jour. Et plus c’est énorme, plus, cela marche.
Dans le genre gonflé et sans scrupule, les six individus d’une trentaine d’années qui ont pris position, il y a quelques jours, le long de la rue principale du village de Ceintrey, au sud de Nancy, ont fait fort.
Chasubles fluo sur le dos, ils ont arrêté les voitures et réclamé de l’argent. Soi-disant au nom des Restos du Cœur.
Et lorsque certains automobilistes se sont étonnés de leur présence, ils ont répondu qu’ils avaient l’accord du maire pour faire la quête.
Ce qui n’a pas convaincu tout le monde. « Une administrée a trouvé ça bizarre et m’a appelé. J’étais au boulot à Nancy et je me suis précipité à Ceintrey », explique le premier magistrat de la commune, Michel Voirin.
Maire pas d’accord
Le temps de faire le trajet et l’élu déboule dans la rue principale du village. Les quêteurs sont toujours là. « Ils étaient en plein milieu de la rue… devant chez moi », sourit le maire. Lorsqu’il arrive, une automobiliste d’une soixantaine d’années est sur le point de donner un peu d’argent.
Michel Voirin l’arrête. « Je lui ai dit que c’était de l’escroquerie ».
Le maire s’adresse ensuite aux faux quêteurs et vrais escrocs.
Le dialogue prend une tournure surréaliste : « Ils m’ont dit qu’ils avaient l’approbation du maire. Je leur ai dit que cela m’étonnerait car le maire, c’était moi ! Ils se sont alors enfuis comme une volée de moineaux ».
Les six pseudo-bénévoles des Restos du Cœur ont filé à bord d’un monospace immatriculé dans l’Aude. Avant de démarrer, ils ont balancé quelques noms d’oiseaux à la figure du maire.
Ce dernier a alerté les gendarmes. Mais ils ne sont pas arrivés à retrouver la trace de la petite bande.
« Je suis persuadé qu’une fois grillés dans un village, ils vont dans un autre. J’ai l’impression que c’est un type d’escroquerie qui se développe. Et c’est particulièrement lamentable. Car les gens ont l’impression de participer à une bonne cause et ils se font avoir », râle Michel Voirin.
Les arnaqueurs ont-ils sévi ailleurs qu’à Ceintrey ? Sans doute. Mais policiers et gendarmes n’ont pour l’instant pas répertorié de cas similaires dans le département.
À Ludres aussi ?
À Ludres toutefois, au cours de la semaine dernière, des habitants ont signalé à la mairie plusieurs individus qui faisaient la même chose ou presque. Ils arrêtaient les voitures et réclamaient des dons « pour les pauvres gens ».
Sans plus de précision. « Lorsque la police municipale a voulu les contrôler, ils se sont sauvés », indique le maire de Ludres, Pierre Boileau.
L’élu pratique sur le sujet la tolérance 0 : « Dès que j’ai vent d’une vente ou d’une quête sur la voie publique, j’avertis tout de suite la police municipale et nationale car c’est interdit par arrêté », précise le maire qui a ainsi contrôlé et chassé, en fin d’année dernière, des vendeurs de nougats venus du sud.
Mais là, au moins, il y avait quelque chose à manger. Ce n’était pas juste du vent, de l’esbroufe…
Christophe GOBIN Avec notre correspondante Marie PILLARD