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TRIBUNE LIBRE : LIBRE PROPOS ET CONSTAT !

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Parviendrons-nous à éviter une nouvelle guerre en Europe ?
parOlivier Rimmeljeudi 12 juillet 2012 - 

Voilà un sujet délicat et que personne n'évoque jamais dans les discussions publiques.

Depuis les guerres du siècle dernier, l'Europe s'est construite avec la grande et saine idée qu'il fallait absolument tout faire pour que de nouveaux conflits ne puissent jamais plus émerger.

Une Europe pacifiée (et massivement démilitarisée) dont le principal objectif, constitutionnel d'ailleurs, est la protection de ses concitoyens dans un environnement de paix et de prospérité.

Mais une Europe pacifiée jusqu'à quel point de rupture ?

Quand vous avez un peuple moderne et éduqué, de plus de 500 millions d'habitants, dans 27 pays, subissant une série de pressions (financière, psychologique, sociale, professionnelle, sanitaire, etc.) désormais en augmentation quotidienne, dont la force vive (les gens de moins de 30 ans) ont de toute évidence compris que leur avenir était le néant, ne connaissant que les crises depuis de nombreuses années, je ne pense pas qu'on puisse considérer que la situation ne soit pas au minimum explosive.

 

Alors quelle est la situation ?

Le monde occidental enchaîne une série de crises, d'abord une crise sécuritaire, dont on peut considérer que le point de départ est le 11 septembre 2001, qui lentement nous amène à une crise financière pure, qui démarre en 2007, puis une crise de la dette des États, qui démarre tranquillement en 2009 pour s'enflammer ensuite, puis très vite une crise des crédits financiers en général, qui s'installe dès 2010, puis une crise de confiance généralisée bien présente dès 2011.

Très peu d'analystes font le lien entre les évènements de 2001 et nos crises récentes. Je pense qu'il n'est plus possible de continuer à fermer les yeux et à ne pas pouvoir regarder au delà de quelques années en arrière sans comprendre une série de liens évidents, complexes et tordus, certes, mais bien factuels.

Pour tenter de remédier à toutes ces crises, dont toutes les conséquences sont essentiellement financières, nos courageux et bienveillants dirigeants politiques n'apportent qu'un seul type de solution, emprunter encore davantage auprès de leurs fidèles amis banquiers, puis rembourser encore plus longtemps, tout en augmentant encore plus les intérêts de toutes ces dettes, qu'on fait supporter aux peuples et aux entreprises des peuples, en augmentant leurs charges fiscales respectives, alors qu'ils sont déjà submergés eux-mêmes de dettes.

Bien que ce soit facile à dire, cette solution d'éponger les dettes par encore plus de dette, qui n'est qu'un processus de cavalerie financière, absolument illégal dans toutes les zones de droit pénal, est celle qu'il ne fallait absolument jamais envisager. Pourtant, c'est ce qui est fait, et cela ne semble gêner personne aux USA ou en Europe (mais également au Japon, un cas d'école). Probablement tout simplement parce que les gens ne comprennent rien à tout cela, et surtout parce qu'ils ont encore tous de quoi manger. C'est Henry Ford qui disait "si les peuples comprenaient le système bancaire, je crois qu'il y aurait une révolution avant demain matin".

Toutes ces crises, qui se cumulent les unes aux autres, ne vont pas s'éteindre pour autant, car en toute logique, un bateau qui sombre lentement, sur lequel on ajoute continuellement de la charge, ne va miraculeusement jamais se remettre à flot. De ce côté là, c'est plié.

Le plus dramatique dans l'histoire, c'est que bien d'autres crises vont faire leur apparition dans les tous prochains temps, dont la très attendue crise énergétique, celle du pétrole rare et cher, qui devrait définitivement compromettre toute chance de redressement des civilisations humaines modernes. Envisageons cela à une échéance de 10 à 50 ans, dans une vision optimiste.

Entre temps, nous aurons eu la crise des CDS ("Credit Default Swap", un mécanisme machiavélique qui fonctionne quand tout va bien, qui devient infernal quand tout va mal, et qui va achever la finance mondiale, et l'industrie de l'assurance), la crise immobilière qui va mettre tout le monde d'accord (sic !), la crise de l'or et des matières premières, et la crise sociale et humanitaire qui conduira à la réintroduction, dans les pays modernes, des "bons alimentaires", des quotas de rations alimentaires pour les "pauvres" et les "démunis", des files d'attentes interminables devant les commerces et les pharmacies, puis les hôpitaux.

Bref, dans les années à venir, on n'a pas finir d'entendre parler des crises, de quoi devenir paranoïaque, objectivement.

 

Mais quid des peuples en souffrance, quelles réactions en attendre ?

C'est la grande inconnue. Une double inconnue même. Quand le point de rupture sera-il atteint en Europe ? Et avec quelle force de réaction les peuples vont-ils se retourner contre le "système" ?

Je pense que la première question est simple à répondre. L'élément crucial, c'est l'alimentation humaine, nourriture et eau potable, le point de rupture est atteint quand il y aura défaillance dans l'alimentation humaine. Tant que les gouvernements parviendront à maintenir une organisation qui permettra l'approvisionnement sécurisé et adéquat en alimentation, et surtout en eau potable, toutes les manifestations violentes, ici ou là en Europe (qui deviendront néanmoins permanentes un peu partout) ne seront que des broutilles, faciles à gérer avec des forces de l'ordre très opérationnelles, bien équipées et bien formées (mais qui fatigueront néanmoins).

Personne ne peut prédire quand interviendra ce point de rupture en Europe, on peut juste pronostiquer que l'échéance arrivera tôt ou tard, les premiers signaux ne sont pas encore très visibles.

La deuxième question est déjà beaucoup moins évidente à traiter. Quelle est la puissance de réaction des peuples quand ils vont se retourner contre le "système". Là on parle bien de violence, d'affrontements, de révolution, et il y aura des victimes, car 500 millions de personnes qui ont faim dans le pic de la situation, c'est ingérable.

Là non plus personne ne peut rien prédire, en Europe, les armes ne sont pas en circulation libre et le port d'arme est généralement prohibé, l'immense majorité des gens ne sont pas formés aux combats, l'Europe étant pacifique, on voit mal comment soudainement des masses de gens pourraient s'organiser et se confronter aux autres, par la violence comme on la connaît dans les pays arabes ou africains.

De plus, avec l'expérience qu'on a en Europe des manifestations même les plus violentes, on voit bien que des dizaines de milliers de gens "armés" de cornes de brume, de vuvuzela, de drapeaux, de bannières et même de pavés ne pèsent pas lourd devant des centaines de policiers "RoboCop" des forces de maintien l'ordre, suréquipés, formés, très mobiles, organisés et surtout armés.

Le tournant se fera dès lors que les manifestations seront vraiment organisées, que les manifestants seront prêts à se sacrifier, et surtout qu'ils seront décidés à s'équiper lourdement eux aussi. On constate que c'est le cas quand on observe les groupes hyper radicaux comme les "Black Bloc", dont le phénomène finira par faire des émules à mon avis.

 

Éviterons-nous les affrontements très violents, et même la guerre ?

Pour qu'il y ait une guerre, il faut des ennemis identifiés, et organisés. Est-ce que des États européens vont entrer en guerre pour protéger les intérêts de leurs peuples ou leurs intérêts stratégiques ? Difficile à dire, difficile à croire, mais on ne peut pas l'exclure, surtout si un pays se dit victime des agissements d'un autre, et que la tension monte jusqu'à la rupture du dialogue diplomatique, jusque là soigneusement évité. Généralement, les pays victimes des autres en Europe seront nécessairement les plus faibles. Mais comment les choses vont-elles se passer si plusieurs petits pays européens s'unissent contre un plus gros ?

Tout le monde pense à l'Allemagne, en bouc émissaire idéal, mais la France, membre fondateur de l'Europe, n'est pas loin.

Je ne pense pas que le scénario d'une guerre intraeuropéenne puisse voir le jour à brève échéance, il faudrait de nouveaux évènements majeurs, comme une rupture unilatérale des relations politiques européennes à l'initiative de l'Allemagne (ou de la France d'ailleurs) qui abandonnerait ses 26 autres partenaires à leur sort, et qui pourrait conduire certains pays à chercher à contraindre l'Allemagne (ou la France) à partager davantage de ses richesses, par la force.

Je crois plutôt à une désorganisation générale qui conduira à des guérillas (urbaines) plutôt qu'une guerre, et opérées par des milices plutôt que des armées nationales. Dans ce scénario, les opposants seraient, soit les peuples contre les fonctionnaires de l'État de toute nature (les représentants du "système") et contre les banques, soit les riches contre les pauvres, ou même un mélange de tout cela en même temps.

Qui peut nous assurer que demain, les espagnols, mais aussi les millions de chômeurs grecs ne vont pas monter à Berlin (en passant d'ailleurs par Paris) avec des centaines de bus de transport ou en train pour réclamer à l'Allemagne de partager immédiatement avec eux ? Notons que ça ne leur prendrait que moins de 2 jours pour faire le voyage, en toute légalité, et une telle opération se monte sur Facebook et Twitter en quelques heures.

Quoi qu'on en dise, au minimum, on peut parier sur une hausse continuelle de la criminalité généralisée dans les 25 années à venir, et des situations chaotiques dans les zones d'Europe les plus sensibles ou les moins facilement contrôlables.

 

Quelles solutions à court terme ?

Si on voulait vraiment sauver les peuples et notre monde moderne, il faudrait s'attaquer aux banques internationales, entrer en guerre frontale contre quelques centaines d'institutions, constituer une force armée internationale, une task force constituée d'enquêteurs et d'experts financiers, de policiers et de militaires spécialisés dans les interventions de ce nouveau genre, les contraindre à annuler leurs dettes, liquider leurs entreprises financières, nationaliser leurs activités, traquer et emprisonner tous ceux qui ont nuit aux intérêts des peuples. C'est ce genre de guerre là qu'il faudrait mener à très brève échéance. Une guerre qui ne "coûterait" que quelques centaines de milliers de victimes (entre ceux qui vont perdre leur emploi dans les banques, ceux qui se suicideront, ceux qui finiront en prison et les rares qui résisteront dans leurs bureaux, et qui devront être éliminés par la force). Stop. Absolument inimaginable aujourd'hui, de la pure science fiction.

Sur le plan politique et social, il me semble absolument indispensable par contre (bien que cette idée sera également considérée déraisonnable) que des décisions fortes soient prises pour occuper les dizaines de millions de chômeurs en Europe, il faut absolument les former continuellement, et pourquoi pas à des tâches d'intérêt public et au maintien de l'ordre public et républicain, comme l'assistance aux autres au moins le temps qu'ils puissent trouver un emploi. On ne doit en aucun cas maintenir inactifs tous ces gens, qui ont besoin de se sentir utiles, il faut leur offrir l'avantage d'être utiles, visiblement.

 

Quelles solutions à plus long terme ?

Je crois que la décroissance contrôlée est la clé, mais pas seulement. Je conseille aux gens d'apprendre à produire leur nourriture, et fonctionner par l'entraide en petit réseaux locaux, entrer en contact avec les producteurs et artisans, comprendre qui fait quoi, et qui peut aider à faire quoi, progressivement introduire l'autonomie dans son mode de vie, et la mutualisation des ressources locales. On peut aussi envisager de se mettre à l'écart des zones à risque, changer de vie, partir loin. La mondialisation ne doit pas être le modèle.

On ne peut pas exclure que dans les 50 prochaines années, le monde moderne fasse un brutal retour en arrière de deux siècles.

Mais restons optimistes et gardons espoir, la nature humaine a toujours su s'adapter à toutes les situations, et parfois, il faut reculer pour mieux sauter.

 
 Source et publication: http://www.agoravox.fr/actualites/europe/article/parviendrons-nous-a-eviter-une-119870

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